Calotte de Madame de la Vrillière de chef des coquettes
De par le dieu porte-marotte,
Nous, Généraux de la Calotte,
Apprenant que Dame de nom,
Se moquant du qu'en dira-t-on,
Au désespoir d'entendre dire
Que Louis Quinze, notre Sire,
Du beau sexe fait peu de cas,
Et qu'il prend ses plus doux ébats
Aux festins, aux jeux, à la chasse,
Était venue avec audace
S'offrir devant toute la Cour
Pour lui montrer le jeu d'amour,
Assurant et donnant parole
Qu'après deux ou trois mois d'école
Cet aimable prince, homme fait,
En serait encore plus parfait
Et qu'il prendrait feu pour les Dames,
La passion des grandes âmes ;
Témoin Henri le Conquérant,
Et de nos jours Louis le Grand,
Ces deux rois fameux dans l'histoire
Par leur valeur et par leur gloire.
À ces causes, favorisant
Ladite Dame, proposant
Un si bel et si noble axiome
Pour le bien de tout le royaume,
Se sacrifiant de bon cœur
Pour hâter le plus grand bonheur
Que puisse désirer la France,
Nous voulons qu'en cette occurrence,
Dussions-nous choquer les bigots,
Les femmes prudes, les cagots,
Tout calotin, mâle et femelle,
Lui tienne compte de son zèle,
Et loin de le trouver mauvais,
L'exalte plus que la Beauvais,
Qui bien que borgnesse eut la pomme
Et rendit Louis Quatorze homme,
Au lieu qu'avec l'air gracieux
Son émule a de très beaux yeux
Et sans doute autant de routine
Qu'il en faut pour une héroïne
Qui veut Louis Quinze former
En l'instruisant dans l'art d'aimer.
Lui donnons par munificence
Vingt bouteilles d'eau de jouvence
Pour mettre à l'abri son beau teint
Contre l'âge qui tout éteint.
Lui donnons la double calotte
Sur son chignon en papillote
Ainsi que notre médaillon
Avec girouette et papillon,
Grelots, souris, rats et sonnettes.
La créons chef de nos coquettes.
Sous peine de témérité
Défendons à toute beauté
De lui disputer un tel titre,
Lequel voulons qu'on enregistre
Par ce brevet et mandement
Es chartes du grand Régiment.