Brevet qui donne aux Sieurs Rabusseau et Boisset la charge de censeurs des divertisements et concerts du Régiment
Brevet qui donne aux Sieurs Rabusseau et Boisset
la charge de censeur des divertissements et concerts du Régiment
Momus, le dieu des papillons,
Des rats, des grelots, des atomes,
Chef des follets et des fantômes,
Directeur des esprits brouillons,
Grand distributeur de sonnettes,
Protecteur de toutes sornettes,
À nos amés les concertants,
Tous gens qui perdent là leur temps,
Grands amateurs de fariboles
Et contemplateurs de paroles,
Gens portant en poche leur ton
Pour accorder basse et basson,
À tous fins gourmets de musique
Dont on peut craindre la critique
Salut et jubilation,
Et contenance létifique.
Ayant pourvu le S. Constart,
Dont on ne peut trop vanter l’art,
De la charge d’auteur lyrique
Qu’occupait le Sieur Rabusseau,
Voulant pour ce sujet nouveau
Que cette place soit unique,
Audit Sieur Rabusseau donnons
Et par ce brevet accordons,
Attendu son humeur sincère,
La place de censeur sévère
A la suite de nos concerts.
Voulant qu’on n’y puisse rien faire
Qui s’exécute de travers,
Ce qui pourrait fort nous déplaire,
Et comme en qualité d’auteur
Il aurait pour coadjuteur
Le Sieur Boisset, dont la science
Mérite une ample récompense,
Nous entendons qu’il soit uni
Au Sieur Rabusseau dans sa charge
Et que son nom soit à la marge
Du brevet dont il est muni.
Que pour mieux entendre et connaître
L’effet d’un divertissement,
Sous la tribune sans paraître
Ils prononcent leur jugement.
Et comme il est à tous notoire
Que notre féal Rabusseau
A mis à sec son écritoire
Pour composer maint bon morceau,
N’épargnant ni peine ni veille
Pour nous prodiguer des merveilles,
Pour changer à chaque moment
Le meilleur divertissement,
Notamment la fête champêtre
Qu’il nous a fait trois fois paraître
Sous différents déguisements,
Nous lui donnons pour son salaire
La somme de trois mille francs,
Pris sur les morceaux brillants
De son successeur et confrère.
Fait dans notre palais des rats,
Sans chandelle, entre deux draps
Et transcrit au clair de la lune
Publié dans notre tribune
Devant le peuple calotin.
Signé Aymon et Saint-Martin.
F.Fr.15017, f°175r-177v - Lille BM, MS 65, p.1-5