Brevet du Régiment de la Calotte sur le différend du Premier Président du Parlement de Paris avec les chambres
Brevet du Régiment de la Calotte sur le différend
du Premier Président du Parlement de Paris avec les chambres1
De par le dieu porte-marotte,
Nous, général de la Calotte,
À notre Premier Président
De notre cour de Parlement,
Salut, joie et prospérité,
Et surtout robuste santé !
Ayant appris avec satisfaction
Que le magistrat en question
Pour délasser sa compagnie
Et autres de leur confrérie
Des fatigues qu’ils ont essuyées
Sur l’affaire dont ils sont dessaisis
Par un arrêt bien réfléchi,
Donne tous les jours assemblées,
Et que pour éviter le scandale
Il prend le temps du carnaval
Sans examiner mûrement
Si tous aiment le divertissement.
Car comme dans toute société
Il y a des esprits divisés
Qui, sous ombre de dévotion,
Échangent les jours de récréation
En austères mortifications
Et qui, par contradiction,
Quoique dans l’opulence,
Du très cher Mardi-Gras
Font un jour d’abstinence.
Du nombre de ces méprisables
Qui causent toujours du fracas
Dans ce corps très respectable
Il s’est trouvé un robin
À face de gros Thomas
Qui, de contrarier jamais las,
Leva un lièvre un matin
Et demanda à notre Président
Si pour n’innover au Parlement
Il voulait suivre avec honneur
L’exemple de ses prédécesseurs
Qui, de chagrin d’avoir obéi,
Au tombeau ont été conduits.
Mais comme notre magistrat
Par sa doctorale capacité,
Reconnaissant à sa docte pensée
Le plat discours d’un fier fat,
À cru d’un silence de mépris
Honorer ce discours d’étourdi,
Qui, d’humeur est aussi brutal
Qu’est d’ordinaire un gros cheval.
Voyant la fermeté intrépide
Et le martial courage
Que ce magistrat rigide
Par bon et juste pressentiment
Veut nous donner pour leur gage
De son entier dévouement,
Aussi et pour mettre à profit
Et récompenser en même temps
Les talents d’un si rare esprit
Qui a trouvé le secret avec rien
De faire perdre le temps
À mainte sorte de vauriens,
L’admettons pour le présent
La queue de notre régiment,
Comme surnuméraire seulement,
Attendant nouvelle création
Qui doit se faire incessamment
De charges de distinction.
À lui seul octroyons le pouvoir
D’ordonner, même de commander,
À toute heure, matin et soir,
Ainsi qu’il le jugera à propos,
Pour faire réunir et assembler
Tous les sujets de son tripot,
Permettre seul ou défendre
De délibérer sur toutes matières
Quand elles seraient particulières
Sans qu’ils puissent l’entreprendre.
Et en outre, le cas arrivant
Que par son ordre convoqué,
Quelqu’un par paresse ou autrement
Ne soit pas à l’heure arrivé,
Commettons l’huissier de service,
Même la grandeur d’office,
Avec permission complète
D’aller sans tambour ni trompette
Chercher conseillers aux toilettes,
les présidents à leur buvette,
Qui auraient été matinals
Ne s’étant couchés qu’après le bal.
Et puisque du palais les officiers
ont congé comme des écoliers,
Permettons aux commis greffiers
De sortir du laboratoire
Pour se promener à la foire
Et à tous greffiers à peaux
Et clercs de procureurs nouveaux
D’y aller voir les jours d’adresse,
Apprendre à vivre de finesse.
Et que, pour des avocats les esprits
Soient parfaitement divertis,
Ils auront libre entrée
Chez Polichinel, roi des fées.
Donné au palais de nos rats,
L’an et jour qu’un de nos avocats
Fit échange avec un huissier
D’un soufflet pour un coup de pied.
Ces présentes non scellées
Ne sachant où les Sceaux sont allés.
- 1Autre titre: Brevet du Régiment de la calotte pour M. Peletier, premier président. 1737 (F.Fr.13662
Cairambault, F.Fr.12707, p.227-31 - F.Fr.12655, p.255-59 - F.Fr.13662, f°10r-11v -F.Fr.15148, p.330-37 - F.Fr.15231, f°185r-186v - BHVP, MS 659, p.198-203 - Lille BM, MS 64, p.425-32