Brevet du comte de Clerc
De par le dieu porte-marotte,
Nous, généraux de la Calotte,
À l’honneur du Comte de Berc
Lequel, quoiqu’ayant pris naissance
Dans le pays de sapience,
En gasconnades est grand clerc.
Savoir faisons qu’en homme sage,
Ayant vanté son équipage
Avec lequel auprès d’Anet
Le plaisir de chasse il prenait,
Il convia par grande instance
Jeune prince du sang de France
De venir chasser, l’assurant
Qu’il aurait un plaisir très grand.
Ce prince, chasseur, et qui compte
Sur la parole dudit comte,
Accepte l’offre et pour marqué
Croit l’animal, et qu’attaqué
La meute digne de louange
Le prendra sans prendre le change,
Et qu’elle fera grand honneur
Au susdit de Berc, grand veneur.
Mais comme les choses humaines
Sont le plus souvent peu certaines,
Le prince, au rendez-vous donné,
Ne trouvant ni meute ni comte,
Fut d’abord sensible à la honte
De se voir ainsi gasconné.
Mais bientôt, pensant qu’une Altesse
Doit faire preuve de sagesse,
Il prit la chose galamment,
Ou plutôt socratiquement.
À ces causes, vu la prudence
Qu’a fait voir le susdit de Berc
A l’égard d’un prince de France,
Plus vif et plus prompt qu’un éclair,
Lui donnons sauvegarde sûre
Pour gasconner impunément
Et pour hasarder aventure
Sans en craindre l’événement.
Or, comme une pareille audace
Lui donne un très grand relief
En fait et de meute et de chasse,
Lui donnons par le présent bref,
La dignité, le titre et grade
De capitaine du vaudrail
A la charge d’être discret
En donnant trait de gasconnade,
De peur qu’un calotin plus prompt
Ne l’en payât par quelque affront.