Brevet de gouvernante des déserts d’Arabie pour la De Prie, maîtresse de M. le Duc de Bourbon
Brevet de gouvernante des déserts d’Arabie
pour la de Prie, maîtresse de M. le Duc de Bourbon
Nous, Philippe-Emmanuel de Torsac, en considération de nos hauts faits généralissime de la Calotte, à tous ceux qui ces présentes verront, Salut. Nous, ayant vu la requête présentée par Dame de nom et ayant égard aux faits d’icelle, le Régiment assemblé au Champ de Mars, Momus présent, l’avocat du Régiment1 ayant pris la parole, nous a fait lecture, où ladite Dame entre autres choses nous aurait présenté, qu’après avoir rendu des services considérables à l’État et avoir été le secret conseil d’un Prince de nom2 , vu même la tendresse qu’elle avait à prévenir ses désirs amoureux, il aurait plu au souverain pour récompense de tant d’actions méritoires la reléguer en pays lointain3 , mais comme un esprit si rempli de vastes idées que le sien ne peut demeurer oisif, elle nous supplie de lui accorder quelque emploi dans notre Régiment et voulant bien agréer sa requête, l’assemblée, après avoir mûrement délibéré quel emploi pourrait lui être convenable, de l’ordre de Momus et du consentement de toute l’assemblée, nous lui donnons et octroyons dès à présent le gouvernement des déserts d’Arabie, lui permettant d’y exercer ses vastes et chimériques idées, de projeter pour la propagation du genre humain. Pour y réussir, elle pourra faire alliance de sujets étrangers et même très inférieurs en rangs et en mérite. Mais comme toutes ces sortes d’alliance ne peuvent apporter quant à présent aucun bien à son dit gouvernement, lui permettons d’y faire construire plusieurs hôpitaux et de les faire diriger par nos sujets nommés pour ces offices, lui enjoignant au surplus de se charger de la fourniture des matelas, comme étant les meubles les plus nécessaires à la réussite de ses projets, et afin que par les comptes qu’elle nous rendra, elle ne puisse être accusée, comme l’a été certaine personne à elle connue4 , nous lui défendons expressément de charger aucune personne de ce soin. Lui accordons en outre cinquante mil livres de rente sur la vente des bois et des cerfs qui seront chassés dans son gouvernement et ne pourra ladite Dame faire la vente desdits bois sans en communiquer à son mari comme devant être plus au fait que tout autre de la connaissance de semblable marchandise, et pour marque de notre estime particulière pour ladite Dame, afin que la présente patente porte son plein et entier effet, Momus, de sa grâce spéciale l’a signée de sa main, nous l’ayant aussi signée de la nôtre, nous avons fait apposer le grand sceau du Régiment, et contresigné, Lazare, secrétaire du Régiment.
F.Fr.12785, f°148-150r - BHVP, MS 664, f°30v-34r - Mazarine, 3971, p.73-78 - Bordeaux BM, MS 700, f°316v-320v - Lille BM, MS 63, p.41-45