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Brevet de chef des ménestriers du Régiment de la Calotte, en faveur de Son Altesse Sérénissime, M. le Prince de Conti

Brevet de Chef des Ménestriers du Régiment de la Calotte,
en faveur de son Altesse Sérénissime M. le Prince de Conti1
De par le dieu porte-marotte,
Nous, Général de la Calotte,
À gens de toutes conditions,
Salut et bénédiction.
Ayant su par un fait notoire,
Que depuis notre consistoire,
Gens d’importance, valant peu,
Regardant nos lois comme un jeu,
Malgré raison, malgré justice,
Choisissaient de leur seul caprice
Leur emploi, leur charge et leur rang,
Se mêlant aux Princes du sang ;
Dans ce haut rang où, d’âge en âge,
La vertu mâle et le courage,
La candeur et l’amour des lois
Nous ont fourni de si grands rois.
Là, s’est allé fourrer un Prince,
Ou soit disant, de mine mince,
Bossu, boiteux et contrefait,
Un Polichinelle trait pour trait,
Dont l’estomac est une poche
Qui rend par hoquet le matin
L’affreux venin, que La Roche
A mis la veille dans son sein.
Son âme est basse et malfaisante,
Sa langue est noire et médisante ;
Jaloux, soupçonneux, sans honneur ;
Au moindre bruit mourant de peur,
Manquant cent fois à sa parole,
Pour raison d’une seule obole ;
Bardache, ivrogne, putassier,
Fourbe, menteur et tracassier.
Le seul savoir dont il se pique
Est de déchiffrer la musique
Avec sa flûte, dont le son
Semble être un sifflement d’oison.
Le tout vu, pour faire justice,
Le voulons pourvoir d’un office
Qu’il puisse exercer dignement
Dans notre fameux Régiment.
Ordonnons que, sans plus attendre,
On le fasse à présent descendre
D’un rang où, par distraction,
Destin le mit en rang d’oignon.
Nous lui donnons pour domicile,
Puisqu’en autre point n’est habile,
Une loge dans l’Opéra
Où suivant son gré jugera ;
Car juger est une manie
Qu’il a tenue toute sa vie.
Par les présentes, l’ordonnons,
L’érigeons et l’établissons
Juge souverain, despotique,
De concerts, ballets et musique.
Voulons, sous son commandement,
Mettre celle du Régiment.
Ordonnons qu’il aura pour gages
Cent mille écus sur les plumages
Des corbeaux, bons aux clavecins,
Sur les carillons et tocsins.
Et ce, par toute préférence,
Ainsi que porte l’Ordonnance,
Sans souffrir diminution
De future succession
D’une grande fille trouvée,
Qui par lui fut légitimée.
Ce serait triste événement,
Si tout le soin qu’a pris la Roche
Ne déversait rien que du vent
Pour une petite anicroche.
Donné dans notre tribunal,
Neuf ans après que Montrival
Passa près du cheval de bronze,
Un matin entre dix et onze.

 

  • 1La calotte continue toujours ses opérations cyniques. Il y a un brevet sanglant contre M. le prince de Conti (Bouhier-Marais)

Numéro
$4100





Références

1732/1735, III, 54-57 1752, III, 54-57 F.Fr.12785, f° 34r-37r F.Fr.15014, f° 203r-205v F.Fr.25570, p.537-540 - Arsenal 3128, f°246r-247r - Arsenal, 3329, pièce 31 Arsenal, 3359, p.251-254 Bordeaux, BM, 700, f° 341r-344v Grenoble, BM, 587, f° 128v-129v Lyon, BM, 754, f° 166v-168v - Bouhier-Marais, II, 116


Notes

$4493 en est une autre version, qui diverge pour plus de la moitié du texte.