Arrêt pour recevoir les Hollandais dans les troupes auxiliaires de la Calotte
Arrêt pour recevoir les Hollandais
dans les troupes auxiliaires du Régiment
De par le dieu porte-marotte,
Nous, général de la calotte,
Ayant appris que les états
Vulgo, les États de Hollande,
Peuvent fournir plus de soldats
Qu’il n’est de saints dans la légende,
Qu’en urgente nécessité
Leurs milices auxiliaires
Avec courage ont résisté
Aux invasions étrangères,
Qu’au surplus depuis nombre d’ans
Ils travaillent en faux brillants,
Mots nouveaux, phrases singulières,
Antithèses, jargon, mystères
Ce qui tend à l’utilité,
Salut, honneur, prospérité.
Des citoyens de la calotte
Débitent excellent antidote
Contre justesse et jugement,
Élégance et raisonnement.
En outre contrefont encore
Maintes expressions sonores
Qui se fabriquent à Paris
De la façon des beaux esprits
De l’une et l’autre académie
Où le français se purifie
Avec bel art, qu’un jour sera
Que notre langage fera
Nargue à Bussy l’épistolaire,
A Regnier faiseur de grammaire,
A Vaugelas l’annotateur,
A d’Ablancourt le traducteur,
A Potra ce fameux puriste,
A Montalte l’antisophiste,
Au satirique Despréaux,
A l’écolière Des Barreaux,
A Pelisson l’académique,
A Racine le grand tragique.
Et lors aura notre discours
Tout au moins d’aussi nobles tours
Que, grâces aux Vandales,
Le beau latin des Décrétales.
A ces causes, nous les régents,
Pour recruter nos régiments,
Voulons qu’en ce pays belgique
Aux enrôlements soient nommés
Les suivants illec renommés :
Le faux saunier du sel attique,
Damis, poète traducteur,
Philosophe, dissertateur,
Le tout à dix florins la feuille ;
Philippe, auteur du portefeuille
Contenant mots et dits joyeux,
Des beaux esprits marécageux
Sentences, expressions tendres
Où brille jusqu’à l’Homme aux cendres
Et l’historiographe Bruzen,
Des compilateurs le doyen,
Potin, le rimeur à la glace,
Limiers qui marche sur la trace
Des Chapuzeau, des Scudéry,
Des Récollet et des Letry,
Le grand correcteur des ouvrages
Qui naissent dans les marécages
De la Belgique nation,
Où par son approbation
Arrivent de la Grande-Bretagne,
De la Suisse, de l’Allemagne,
Et ne seraient tenus bourgeois
S’ils ne passaient dessous ses lois.
Lui adjoignons en son office
De recruter notre milice
De tels qu’ils jugeront à propos,
Fussent-ils natifs visigoths.
De notre grâce spéciale
Leur permettons des prédicants,
Diacres anciens et proposants.
Mais ne voulons qu’il se cabale
Entre eux pour la foi de Calvin
Contre le Pontife romain.
Leur défendons la controverse,
Souffrant que leur zèle s’exerce,
Mais avec modération,
Sur la fressure de Sion.
Leur laissons certaines marottes
Pour leurs dévots et leurs dévotes,
Comme de leur parler souvent
Par types ou mystiquement,
Et d’obscurités consolantes
Nourrir les âmes protestantes.
Plus, en langage de Marot,
Pour l’amour de la gent wallonne,
Peuple saintement idiot,
Voulons que le psaume s’entonne ;
Et comme sans cesse Saurin
Par son clinquant se recommande,
Nous nous rendons à sa demande
D’être nommé leur chapelain
Voulons même que Ch… (sic)
En second desserve le prêche,
Quand auparavant il aura
Songé qu’il ne se dédira ;
Et pour qu’un malade n’empêche
Ledit de vaquer au sermon,
A la prière, à l’oraison,
Permettons qu’en face d’église
Pour consolateur on élise
… [sic] que chacun connaît,
Ennemi de tout intérêt,
Dévot sans cautèle et sans bile,
Enfin homme de l’Évangile,
Et qui facilite le mieux
Aux mourants l’entrée des cieux.
Lui donnons pour sa subsistance
Héritage à suffisance.
Fait au conseil et mis au net
En octobre le dix-sept.
F.Fr.9353, f°285v-287v - F.Fr.15014, f°61r-64v - Lille, BM, 63, p.367-78