Pièce sur la promotin de M. Boulongue
Pièce sur la promotion de M. Boulongue,
intendant des finances,
Fils du peintre de ce nom,
Ardent regrattier du Parnasse,
Où sous le plumage emprunté
De l’oiseau par Léda flatté,
Corbeau décédé1
, tu coasses,
Faux prêtre intrus dans un clergé
D’où le bon goût en vain le chasse,
Balayeur du Pinde, d’Horace,
Valet de pied, chantre agrégé
Parmi ceux dont en Arcadie
La voix a tant de mélodie
Rimeur en dépit d’Apollon
Oméga du sacré vallon
Du grand et sublime Voltaire,
Soumis et rampant caudataire,
Soi-disant poète engagé
De ce mirmidon rengorgé
Dont l’air important n’en impose
Qu’à ceux dont par le préjugé
L’œil vulgaire mal dirigé
A travers sa métamorphose
Ne voit pas avant toute chose
Le pinceau dont il fut forgé
Dans cette grand circonstance
Ou pour éclairer la finance
On lui met en tête un falot
Choix qui fait honneur à la France
Chante donc, fade camelot,
Mais non, notre ami ne dit mot
Tais-toi ! tes vers quoiqu’à la glace
Rendraient sans doute encor plus vain
Ce fier paon déjà trop enclin
A s’enorgueillir d’une place
Où sans le secours de la grâce
Ne serait jamais parvenu
Un chétif geai tel qu’on l’a vu.
Tais-toi ! la plus froide louange
A droit de se faire écouter.
Ce mets friand propre à tenter
Fait sa dupe de qui le mange
Ignorant l’art de l’apprêter.
D’où vient qu’avant que d’en tâter
L’homme d’esprit le décompose
Et que facile à contenter
Le sot ne songeant qu’à la dose
Avale tout sans rien goûter.
- 1M. Tanevot.
Clairambault, F.Fr.12711, p.39 - Maurepas, F.Fr.12647, p.32-33 - F.Fr.10477, f°61 - F.Fr.13656, p.349-51 - NAF.9184, p.383