Aux prélats de la France pour la Constitution1

Ministres du Seigneur, protecteurs de la foi,

Vous qui, assemblés par un ordre du Roi

Chez ce prélat si saint, si rempli de sagesse,

De son cœur plein de Dieu imitez la sagesse.

Voyez, examinez, cherchez la vérité.

C’est ici qu’il vous faut beaucoup de fermeté.

Toute l’Europe attend de vous ce grand courage

Qu’on voyait autrefois triompher à Carthage.

Ne laissez pas fléchir du savant Augustin

Les doctes sentiments ni son amour divin.

Soutenez du Seigneur l’empire de la grâce

En méprisant celui qui s’en va et qui passe,

Sans flatter le pécheur d’un commode pardon.

De saint Charles gardez l’esprit et les canons.

En vain vous les donnez dans tous vos diocèses

Si vous voulez, laissez les pécheurs à leurs aises

C’est mener le troupeau dans la gueule des loups,

C’est s’attirer de Dieu le terrible courroux,

L’horrible cruauté de laisser la morale

À la direction d’une lâche cabale.

Prenez garde, prélats, tout est perdu pour vous

Si de cet ennemi vous ne parez les coups.

Défendez hautement d’une force divine

De vos prédécesseurs la constante doctrine ;

Qu’un plus gros évêché, un plus puissant crédit

Ne soient point des appas qui vous gâtent les prix.

En vous la vérité se trouve renfermée

Ainsi que le soleil dans la brillante nuée.

Que de noires vapeurs n’aillent point empêcher

Que des astres si beaux faits pour nous éclairer

Ne retiennent pour eux par vaine complaisance

La vérité qu’il vous faut mettre en évidence.

Découvrez des dogmes corrompus,

Faites goûter le règne de Jésus.

On espère que Dieu répandra sa lumière

En vous donnant à tous une sagesse entière.

Il vous saura si bien remplir du Saint-Esprit

Qu’on verra tout d’un coup apaiser ce grand bruit.

Prenez du vrai parti une juste défense,

Agissez en prélats, et prélats de la France,

Le Roi sera content, le pape satisfait,

Et l’Église sera dans un repos parfait.

• 1Autre titre : Requête à nos Seigneurs les prélats assemblés pour la Constitution, le 3 octobre 1713