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L'écho du Régent

L'écho du Régent
Dans mes nobles desseins il n’est rien qui m’arrête.
Arrête.

Qui ose m’interrompre ou s’attaquer à moi ?
Moi.

Je crois que c’est l’écho, souffre que je te parle.
Parle.

Lequel aimes-tu mieux, Versailles ou Vincennes ?
Vincennes1 .

La vue en est charmante et l’air en est meilleur
Meilleur.

Approuves-tu mon choix et faut-il que j’y reste ?
Reste.

J’aime les Parisiens, ne me blâmes-tu point ?
Point.

Louis avait pour eux beaucoup d’indifférence.
Différence.

Je prends avis; surtout dis-moi si je fais bien.
Bien.

Que dois-je faire encore au delà de savoir ?
Voir.

Devrais-je exclure aussi les lois du grand Bourbon ?
Bon.

Que devient aujourd’hui son peuple malheureux ?
Heureux.

Que reste-t-il à ceux qui sont au désespoir ?
Espoir.

Mais changeons de propos, sai-stu où est Louis ?
Oui.

Enseigne-le-moi donc, écho, si tu m’écoutes ?
Écoute.

Qu’était ce grand héros qu’on disait immortel ?
Mortel.

Qu’aurait-il voulu être en ce triste passage ?
Sage.

Et que devint son cœur jusqu’alors insensible ?
Sensible.

Qu’est devenu ce roi qui fit trembler la terre ?
Terre.

Quel agrément a-t-il au milieu des enfers ?
Fers.

Et que lui reste-t-il de cent travaux divers ?
Vers.

Dois-je un peu ménager sa vieille Maintenon2 ?
Non.

Que dois-je faire afin d’épargner la dépense ?
Pense.

Puis-je donc m’emparer des biens de la maltôte ?
Ôte.

Que devrais-je employer ; la douceur ou la force ?
Force.

Que faire au partisan qui peut de moi dépendre ?
Pendre.

Puis-je rendre le peuple heureux, si je le fais ?
Fais.

Dois-je hâter leur trépas ou prendre patience ?
Patience.

Mais qu’en puis-je tirer si j’attends davantage ?
Avantage.

Comment faire à présent pour que chacun s’éveille ?
Veille.

Si les choses vont bien, qu'est-ce que tu préjuges ?
Juge.

Je vois que dans Paris on m’aime assurément.
Sûrement.

Qu’est-ce qui fait qu’en France on vante tant Philippe ?
Philippe.

Mais, enfin, que dit-on, que puis-je mériter ?
Mériter.

Eh quoi ! je suis Régent ; puis-je prétendre encore ?
Encore.

A quoi ? je ne vois pas. Serait-ce d’être roi ?
Roi.

Car à te dire vrai, ma foi, j’en désespère.
Espère.

La Parque en voudrait-elle à notre roi Louis ?
Oui.

Sais-tu ce que tu dis ; cela serait possible ?
Possible.

Le Seigneur est puissant, tu pourrais dire vrai.
Vrai.

Le trépas de Louis en est un grand exemple.
Ample.

Est-il vrai que chacun en paraîtrait bien aise ?
Aise.

Ce prince à tout le monde inspira la terreur.
Erreur.

Noaille avant sa mort n’était-il pas à bout ?
A bout.

Eh bien, m’assures-tu que lui ne le craint point ?
Point.

Malgré son infortune, il fut toujours constant.
Constant

C’est qu’il ne voulait point souscrire à rien d’injuste.
Juste.

Que pouvait-on attendre en ce fameux empire ?
Pire.

Que Dieu nous a-t-il fait, foudroyant l’injustice ?
Justice.

Tu ne sais pas le but de Tellier et Bissy3 ?
Si.

Mais que prétendaient-ils, cherchant à nous déplaire ?
Plaire.

Mais à qui ? Est-ce au roi, aux jésuites, à Rome ?
Rome.

Qui leur avait dicté un si mauvais ouvrage ?
Rage.

Et que nous ont coûté ces mortelles alarmes ?
Larmes.

Louis était gagné, on l’avait ébloui.
Oui.

Il s’était rétracté même avant qu’il trépasse.
Passe.

Le pouvait-il sans crainte ? ou ne craignait-il rien ?
Rien.

Que manquait-il pour mettre en repos sa conscience ?
Science

Noaille aura son tour, il faut que je le venge.
Venge.

Que trouves-tu de beau dans son ressentiment ?
Sentiment.

Qui nous a conservé cet envoyé de Dieu ?
Dieu.

Me conseillerais-tu de chasser les jésuites ?
Vite.

Que donner à Tellier, auteur de la discorde ?
Corde.

Comment rendre à jamais sa puissance abattue ?
Tue.

Que faire à Desmarets ? le pendre et le brûler ?
Brûler.

A ceux que le sort a mis au haut de la roue ?
Roue.

Que vont souffrir tous ceux qui causent nos tourments ?
Tourments.

Je suivrai tes avis, déjà je m’y dispose.
Ose.

Au bonheur de chacun il faut que je travaille.
Travaille.

J’espère qu’à jamais Dieu bénira ce règne.
Règne.

Laisse-moi en repos, écho charmant. Adieu.
Adieu.

  • 1« Le Régent, qui était importuné du séjour de Versailles, parce qu’il aimait à demeurer à Paris où il avait tous ses plaisirs sous sa main, et trouvant de l’opposition dans les médecins de la cour, tous commodément logés à Versailles, au transport de la personne du roi à Vincennes, sous prétexte d’un petit rhume,fit venir tous ceux de Paris qui avaient été mandés à voir le feu roi. Ceux-là qui n’avaient rien à gagner au séjour de Versailles se moquèrent des médecins de la cour, et sur leur avis il fut résolu qu’on mènerait, le lendemain lundi 9 septembre, le roi à Vincennes, où tout était prêt à le recevoir. » (Saint-Simon.) (R)
  • 2« Le Régent alla voir Mme de Maintenon à Saint‑Cyr. Il fut près d’une heure avec cette ennemie qui lui avait voulu faire perdre la tète, et qui tout récemment l’avait voulu livrer pieds et poings liés au duc du Maine par les monstrueuses dispositions du testament et du codicille du roi. Le Régent l’assura dans cette visite que les quatre mille livres que le roi lui donnait tous les mois lui seraient continuées et lui seraient portées tous les premiers jours de chaque mois par le duc de Noailles, qui avait apparemment engagé le prince à cette visite et à ce présent. Il dit à Mme de Maintenon que si elle en voulait davantage, elle n’avait qu’à parler et l’assura de toute sa protection pour Saint‑Cyr. » (Saint-Simon.) (R)
  • 3Henri de Thiard, cardinal de Bissy (1657‑1737), fut l’un des plus fougueux promoteurs de la Constitution Unigenitus. Son zèle contre les réformés et les jansénistes, son dévouement aux jésuites et à la cour de Rome le firent combler d’honneurs et de bénéfices. (R)

Numéro
$0076


Année
1715




Références

Raunié, I,104-10 - F.Fr.12796, 12v-15r


Notes

Le seul texte, à notre connaissance, qui paraît s'attendre à la mort du petit roi et à voir le Régent devenir roi.