La disgrâce du P. Le Tellier
Tellier, ta disgrâce
T’attire du mépris
Que la populace
A trop bien appris.
Chacun t’abandonne
Comme on ferait un pendu.
Lanturlu.

Renonce à la gloire
D’être auprès du roi1 ,
Car ta robe noire
Cause de l’effroi
A ce jeune prince
Qui te croirait Belzébul

Du temps de La Chaise,
Ton prédécesseur,
L’on suivait à l’aise
La voie du Sauveur.
Mais par ta malice
Quesnel2 est mis au rebut.

Va trouver ton pape,
C’est ton réconfort,
Car si on t’attrape
Hors de ton ressort,
De ton imposture
Tu payeras le tribut,

Le peuple de France,
Satisfait, content
De ta décadence,
En loue le Régent.
La joie est parfaite
De te voir déchu3 .
Lanturlu.

• 1« Le P. Le Tellier, nommé confesseur par le codicille de Louis XIV, se voyant sans fonction, attendu l’âge du roi, demanda au régent quelle était sa destination présente. Cela ne me regarde pas, répondit le prince, adressez‑vous à vos supérieurs. » (Duclos.) (R)
• 2Le P. Quesnel, célèbre théologien janséniste (1634-1719), membre de la Congrégation de l’Oratoire qu’il abandonna pour ne pas signer un formulaire de doctrine dressé par l’assemblée générale de son ordre. C’est lui qui écrivit le livre des Réflexions morales sur le Nouveau Testament, contre lequel le P. Le Tellier suscita la bulle Unigenitus. (R)
• 3Si la mort de Louis XIV avait provoqué une satisfaction générale, c’était surtout parce qu’elle amenait la chute du P. Le Tellier et des jésuites. « J’ai vu, dit Voltaire, lors des obsèques du feu roi, de petites tentes dressées sur le chemin de Saint‑Denis. On y buvait, on y chantait, on y riait. Le jésuite Le Tellier était la principale cause de cette joie universelle. J’entendis plusieurs spectateurs dire qu’il fallait mettre le feu aux maisons des jésuites avec les flambeaux qui éclairaient la pompe funèbre. » (R)