Sur la mort de Louis XIV
Sur la mort de Louis XIV
Caron, ce pilote infernal,
Voyant le fils du cardinal1
Entrer dans sa funeste barque
Voulut exiger du monarque
Le tribut que les autres morts
Paient en allant aux funestes bords.
Je suis peu chargé de finance,
Lui dit le feu roi de France.
Une ministre avide d’argent,
Une femme altérée de sang,
Un jésuite ambitieux,
Ont rendu mes sujets gueux,
Et moi-même si misérable
Que notre sort est déplorable.
Excusez donc mon indigence,
Je veux en faire pénitence.
Mais l’impitoyable nocher
Eut le cœur plus dur qu’u rocher.
Retire-toi, dit-il soudain,
Homme qui n’avait rien d’humain
Et dont l’extrême ambition
Mérite le sort d’Ixion,
Va, fuis de la rive infernale ;
L’Achéron n’a rien qui t’égale
Et dans ses lieux remplis d’horreur
Tout céderait à ta fureur.
- 1Mazarin.
F.Fr.15152, p.74-76
Ci-gît 1425