Canson sur le P. Pichon, jésuite
Chanson sur le P. Pichon, jésuite
Enfin Pichon a rétracté
Son exécrable ouvrage ;
La superbe Société
De dépit en enrage,
Et surtout le royal censeur1
Qui dit par un blasphème
Que Jésus-Christ s’est à l’auteur
Communiqué lui-même.
Qu’en diront les deux grands prélats
Et d’Aix et de Marseille,
Lâches valets de Loyola ?
Ils en disaient merveilles ;
Ils y trouvaient de Jésus-Christ
(Bon Dieu, quelle méprise)
Le pur et véritable esprit
Et celui de l’Église.
Mais c’est l’esprit du noir Pichon
Et de sa Compagnie
Qui distille l’affreux poison
Dans cet ouvrage impie.
Allez donc, Nos Seigneurs bénis,
Allez donc vous dédire
Et n’approuvez plus désormais
Des livres sans les lire.
Auprès de vos Grandeurs Menoux,
Et le Père Duchesne,
Les journalistes de Trévoux
Contre Arnauld votre haine
Des vingt-quatre vieillards fameux2
Avaient tenu la place
Et du pichonisme odieux
Fait triompher l’audace.
Mais de Pascal le successeur,
Le gazetier critique
Montra le premier la noirceur
Du venin jésuitique.
Tous nos prélats en font l’aveu
Et par reconnaissance
Voudraient-ils condamner au feu
Ses feuilles d’importance ?
Pour vous l’évêque allemand3
Qui de votre suffrage
Par la main de vos suffragants
Décora l’ouvrage,
Rétractez l’approbation
Qui vous fait tant de honte
Et dont lui-même Jean Pichon
Ne vous tient plus de compte.
Trévoux, Cologne et Tournay
Chantent palinodie
Avec Besançon et Bellay.
Formez la mélodie,
Dites avec les accents flatteurs
D’une bonne harmonie
Qu’il faut chercher Jésus ailleurs
Que dans la compagnie4 .
- 1Marcilly, docteur de Sorbonne, rayé du catalogue des censeurs royaux par arrêt du Conseil du 15 février 1748.
- 2Docteurs jésuites qu’Escobar a placés visum visu pour opposer aux 24 vieillards de l’Apocalypse.
- 3De Bale, approbateur du livre du P. Pichon.
- 4 Le P. Pichon a été relégué par ordre de la cour à Mauriac, petite ville d’Auvergne, diocèse de Clermont, pour avoir voulu soulever les évêques d’Allemagne contre ceux de France.
F.Fr.15151, p.313-17