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Sans titre

Les inquisiteurs généraux1

De la république chrétienne,

Docteurs, prélats et cardinaux,

Salut à tel qu’il appartienne.

Le désordre de l’univers,

De Loyola le goût pervers

Que fomente l’esprit immonde,

Et le relâchement des clercs,

Tout nous prédit la fin du monde.

L’antimoliniste Margon,

Loin d’aller prêcher le Saint Nom

Et planter la foi catholique,

Rebelle au décret canonique

Que le Saint Pontife a rendu,

Brave l’Église et ne s’applique

Qu’à planter l’arbre défendu

Pour corrompre les filles d’Ève,

Doucement il leur met en main

La plante sainte dont la sève

A formé tout le genre humain

Et peuplé la cité céleste

Qu’habitent les saints ébaubis,

Ainsi que le cachot funeste

Où les réprouvés sont rôtis.

Le Saint Père, toujours propice,

Qui pour confondre son orgueil

Pouvait lancer de son fauteuil

Foudres, pétards, feux d’artifice,

Préférant douceur à justice,

S’est contenté par son rescrit

De priver ce clerc de l’office

Et du titre de Plantevit.

Mais étouffant tous vains scrupules,

Loin d’accepter les sainte bulles

Comme jugements solennels,

Le rebelle interjette appels

Aux prochains conciliabules.

Loin d’embrasser aveuglément

Des préjugés si vénérables,

Il en veut témérairement

Combattre par raisonnement

Les obscurités raisonnables.

À ces causes, nous déclarons

Qu’à jamais nous le séparons

Du troupeau sacré des fidèles,

Voulant qu’en leur société

Membre mort il soit réputé.

Défendons à toutes femelles

D’avoir, même dans ses besoins,

Avec lui jointures charnelles

Ayant quelque égard néanmoins

À ses faiblesses naturelles,

Permettons que dorénavant

Il puisse comme ci-devant

Pratiquer avec les jésuites

Tout acte communicatif

Soit en actif, soit en passif,

Suivant leurs modes et leurs rites.

Mais comme pour nos intérêts

Nous devons en juges rigides

Faire accomplir les saints décrets,

Ordonnnons que des invalides

Le chirurgien amputateur,

Par provision du Saint Père,

Avec le fer séparateur

Exécute l’ordre sévère

Tellement qu’il ne puisse plus

Lancer le venin de sa plante.

Qu’il n’exploite, qu’il n’instrumente

Avec des témoins corrompus.

Condamnons l’acte appelatoire

Comme un écrit attentatoire

Aux erreurs du siège romain

Malgré toutes preuves sensibles

Qu’opposerait l’esprit humain

À nos jugements infaillibles.

À l’effet de quoi dérogeons

À toutes explications,

Vérités et raisons nuisibles.

Fait au tribunal susnommé,

Scellé du scel accoutumé.

  • 1L’abbé Margon ayant interjeté appel de cette bulle [$0774] au futur concile, la Sainte Inquisition romaine a rendu le décret suivant. Nouveau décret du Saint-Office, fait au prétoire ultramontain ; présent le pontife romain qu’à la foi le ciel convertisse.

Numéro
$8178


Année
1720




Références

Maurepas, F.Fr.12645, p.367-70


Notes

Une des plaisanteries de l'abbé Margon, à propos de son nom de Plantevit. Suite de $0774