Sans titre
Le Roi n’a plus de soucis.
Commère, que j’allons boire,
J’irons à l’Opéra gratis,
À la Comédie, à la foire,
Toute la nuit je bâfrerons,
Je chanterons, je danserons.
À la grève as-tu donc vu
Ce bon Monsieur de Bernage,
Ma foi, qu’il a l’esprit pointu,
Tirer un feu dans une cage
Pour lui tout seul on l’avait mis
Et pour brûler tous ses amis.
La Seine aurait fait du tort
À ce superbe artifice.
Devant on avait mis un cor.
Voyez le biau trait de malice !
Que craignait Monsieur le Prévôt ?
La lune était dans son cerveau.
Que j’aime l’ambassadeur
De ces mangeurs de fromage !
Entre deux tonneaux, son cœur
Tenait ce doucereux langage :
À la santé du bon Louis
Soûlez-vous tous, mes bons amis.
La rue Saint-Honoré
Attirait un million d’âmes ;
Noailles s’était signalé,
Son hôtel était tout en flammes
Que l’on [ill.], voyez un peu.
On dit qu’il n’aime pas le feu.
C’était partout des lampions,
C’était partout de l’artifice,
Partout force vin je buvions
Et au lieu de brûler le Suisse1
On dit que dans la rue aux Ours
On brûlera la Châteauroux.
C’est au faubourg Saint-Germain
Qu’un dimanche après l’office
Les moines se mettront en train
Et feront un peu d’artifice.
On dit qu’on y brûlera
Certaines filles d’Opéra.
Ma commère, souviens-toi,
Qu’environ y a seize années
J’avons eu tout le même effroi,
Que je fûmes bien alarmé,
J’ons tous crié Vive le Roi,
Qu’il se porte tout comme moi.
Pour conserver notre Roi,
Voici ce qu’il nous faut faire
Pour lui, prions de bonne foi,
Après quoi, tout plein il faut boire
Et en ce jour à sa santé,
Et cela le fera bien porter.
- 1De la rue aux Ours.
F.Fr.10477, f°151-52 - BHVP MS 550, f°42r-43r