Sans titre
Saint Père, je viens devant vous
Avec une âme repentante,
Me confesser à vos genoux
D’avoir eu l’âme trop constante
Pour une erreur que j’aime encor.
Dirai-je mon confiteor ?
Le parti me faisait la cour,
Il m’écoutait comme un oracle.
Je passais pour le saint du jour
Faisant quelque petit miracle.
Mais tout ce qui luit n’est pas or,
Dirai-je mon confiteor ?
Un jésuite de bonne foi,
Rempli d’une ardeur sans égale
A fait voir clairement au Roi
Tout le secret de la cabale.
Rome juge en dernier ressort,
Dirai-je mon confiteor ?
Jusqu’à ce fils de Loyola,
J’avais bien mené mon intrigue.
Je répondais à qui va là :
Vive le Roi, vive la Ligue,
Je cède à la loi du plus fort :
Dirai-je mon confiteor ?
Quesnel, vous avez beau crier
Et quoiqu’Bernard me mette en pièces
Sans cesse on me vient reprocher.
Vous faits tort à votre nièce,
Il faut bien la pourvoir encor.
Dirai-je mon confiteor ?
Nos prélats sauveraient Quesnel
Mais le pilatesme les gâte
Un judas à la Haye Penel1
A chacun d’eux comme à Pilate
Fait crier : si hunc dimittis
Non est amicus Caesaris.
- 1Ce village dans le diocèse de Constance, des environs duquel le Père Le Tellier est originaire, et où l’on garde en guise de relique la corde qui a servi à Judas pour se pendre.
Clairambault, F.Fr.12695, p.179-81 - Maurepas, F.Fr.12627, p.165-67