Sans titre
Camuset, La Popelinière,
Coras, non de même manière,
Mais la façon n’y fait de rien.
Du second chacun sait l’histoire
Puisque la chanson l’apprend bien,
De l’autre on a peine à le croire1 .
Camuset contre toute attente
Revient chez lui, met l’épouvante
Car on ne l’attendait pas.
Sa femme un peu plus que galante
Avait alors entre ses bras
Combault dont elle était contente.
Dans un tel embarras que faire ?
Le moyen le plus salutaire
Fut de passer au cabinet.
Le pauvre amant vite s’y cache
Et fait tout doucement le guet
Dans l’espoir que quelqu’un le lâche.
Le jour entier, la nuit suivante
Se passent toujours dans l’attente
Qu’on ouvrira le cabinet.
Mais l’époux, homme inexorable,
Retint dans cet endroit secret
Mourant de faim ce misérable.
De peur que Combault en faiblesse
D’endurer semblable détresse
N’allât de la vie au trépas,
Camuset dit à sa Lucrèce :
Madame, courez de ce pas
Lâcher celui que la faim presse.
Une autre fois, mieux sur vos gardes,
Quand ferez vos danses gaillardes
Prenez-vous y plus finement
pour que de rien je ne me doute.
Allez, retirez votre amant.
Cette fois vous êtes absoute.
- 1Sur M. Camuset, nouveau fermier général, qui, rentrant chez lui lorsqu’on ne s’y attendait pas, trouva M. de Combault, capitaine dans le régiment de Champagne, couché avec sa femme, qui n’eut que le temps de le faire passer promptement dans un cabinet voisin, mais pas si subtilement que le mari ne s’en aperçût, et sans faire semblant de rien, feignant des affaires, il resta trente-six heures dans sa chambre, buvant et mangeant, et couchant même avec sa femme, ce qui ne lui était pas arrivé de quatre ou cinq ans. Enfin, craignant que son homme ne mourût de faim dans ce cabinet, où il n’y avait ni feu, ni lit, ni lumière, il dit à sa femme : Madame, lâchez votre prisonnier et par la suite prenez mieux vos mesures, et sortit de la maison.
Mazarine Castries 3989, p.327-28