Sur le marquis de Gesvres
Sur le marquis de Gesvres
De Gesvres, malgré tes efforts
Tu laisses ta femme pucelle.
De vigueur en un si beau corps
On ne voit aucune parcelle
D’un tel époux
Dis trois fois ton mea culpa.
Jeune, bien fait et caressant,
Tu charmais un cercle de dames ;
Badin, gracieux et complaisant,
Tu t’insinuais dans leurs âmes,
Mais fallait-il en rester là ?
Dis trois fois ton mea culpa.
L’opulente Mascaran
Espérait tout de ta figure ;
Elle te croyait bien fourni
Des présents de Dame nature ;
Par malheur elle se trompa.
Dis trois fois ton mea culpa.
Crois-tu tromper impunément
Une Dame fringante et jeune,
Avec un appétit si grand
Faire observer un si long jeûne ?
L’official en jugera.
Dis trois fois ton mea culpa.
Magistrats intègres et pieux,
Punissez l’auteur d’un tel crime ;
De votre ton sentencieux
Délivrez la pauvre victime,
Et pour pénitence il dira
Plus d’une fois mea culpa.
Son corps est bien configuré
A rapporté la médecine ;
S’il est languissant et glacé,
A quoi sert la montre et la mine ?
S’il ne peut devenir papa,
Qu’il dise son mea culpa.
Il n’a que la virilité,
S’écria sa femme en colère ;
Il rit de ma virginité,
L’ai-je épousé pour ne rien faire ?
Quoi, toujours il en restera
A dire son mea culpa ?
Je l’ai payé, il est content ;
Que je voie de son ouvrage
Ou qu’il me rende mon argent.
Je chercherai mon avantage,
J’en aurai un qui me fera
Tout autrement culpa mea.
Les juges étant assemblés
Pour juger à droit cette cause,
Tout d’une voix ils ont jugé
Et commandé sur toute chose
Que la belle le quittera
S’il ne fait son mea culpa.
Maurepas, F.Fr.12645, p.163-65 - Mazarine, MS 2163, p.86
Sur Bernard Potier, marquis de Gesvres, accusé d’impuissance par Mascrani, sa femme. Elle est morte en 1717.