Sans titre
Du décret qui fait tant de bruit,
Voulez-vous savoir le mystère ?
Voici quel en sera le fruit :
C’est d’établir du Très Saint-Père
Le règne sur la vérité
Par son infaillibilité.
Ce point si longtemps contesté
Manquait à la toute-puissance,
Si le décret est accepté,
La voilà mise en évidence,
En soumettant la vérité
A son infaillibilité.
En vain Docteurs, vous disputez,
Allez tous consulter l’oracle ;
Il tranche les difficultés,
D’un mot, il lève tout l’obstacle ;
Dès qu’il parle, il dit vérité
Par son infaillibilité.
Admirez comment il peut tout.
Dans ses mains tout change de forme.
Il redresse de bout en bout
Ce qui paraît le plus difforme,
Et l’erreur devient vérité
Par son infaillibilité.
Pour gouverner l’Église en paix,
Est-il de moyen plus commode ?
Pourrait-on s’en tirer jamais
En suivant une autre méthode ?
Le beau secret en vérité,
Que cette infaillibilité !
Qu’est-ce que produit l’examen,
Sinon de nouveaux hérétiques ?
Mais dès qu’au Pape on dit « Amen »,
La paix est chez les catholiques,
Preuve qu’on a la vérité
Par son infaillibilité.
A quoi nous servirait un chef,
Sans le pouvoir de nous conduire ?
A quoi nous servirait un bref,
S’il ne pouvait l’erreur détruire ?
Mais il peut tout en vérité,
Par son infaillibilité.
Si quelque esprit irrégulier
Veut s’élever par vaine gloire,
Ce bref, par le bras séculier,
Sait donner la foi qui fait croire.
Le beau secret en vérité
Que cette infaillibilité !
Barbier-Vernillat, III, 47-48 - Recueil de poésies sur la Constitution