Réponse à l’épître de M. de Voltaire en arrivant dans sa terre
Réponse à l’épître de M. de Voltaire en arrivant dans sa terre
près du lac de Genève, en mars 1755.
Ô maison de Voltaire et non pas d’Épicure1
!
Vous renfermez une tête à l’envers
Qui sans connaître la nature
Veut la célébrer dans ses vers.
Plutus est le dieu qu’il adore.
C’est pour lui seul qu’il a vécu.
Il donnerait Pomone et Flore
Pour un écu.
Non, dit-il, le parfait bonheur
Ne se trouve point sur la terre.
Pour le trouver, divin Voltaire,
Sais-tu qu’il faut avoir un cœur,
Grand philosophe sans morale,
Toi qui te fais un dieu de l’or,
Oses-tu nous chanter encor
Les douceurs d’une vie innocente et frugale ?
Ma foi, qui m’offrirait ton lot,
Avec ton humeur incertaine,
J’aimerais mieux celui d’un sot
Vivant sans souci et sans haine.
Quitte Berlin, quitte Paris,
Tu ne seras mufti, ni pape ;
Mais je ne serais pas surpris
De te voir un jour à la Trappe2
.
CLG [éd.Kölving], I, 139-40
Voir mise au point sur le texte dans CLG, II, 140, note 27.