Parodie d'Andromaque
Parodie d’Andromaque
M. de Thiers au gouverneur de Prague
Avant que Gassion vous parle par ma voix,
Souffrez que j’ose ici me flatter de son choix
Et que, plein de ma gloire, à vos yeux je me targue
D’être entré le premier dans la ville de Prague.
Car il est en effet pour de Thiers assez doux
Parmi tant de héros d’être choisi sur tous.
Comme en l’art de parler je fus fort ordinaire,
Je vais vous haranguer, Seigneur, en militaire.
Verrez-vous de sang-froid arriver l’Électeur ?
Les Prussiens, les Saxons ne vous font-ils pas peur ?
Des soldats affamés, redoutez la licence.
Du nouveau souverain méritez la clémence.
Rendez-vous, il est temps. Si j’étais gouverneur,
Je me garderais bien d’attendre le vainqueur.
Le gouverneur
La France en ma faveur s’est trop inquiétée.
A chercher Lobkovitz je l’ai crue occupée
Au reste, vu l’éclat de son ambassadeur,
Je croyais des Français voir arriver la fleur.
Qui croirait en effet que pour cette entreprise
Gassion de Crozat emploierait l’entremise ?
Qu’un peuple tout entier tant de fois triomphant
Se vit sommer ici par le fils d’un traitant ?
Du sang autrichien, je chéris ce qui reste
Et mes soins…
M. de Thiers
L’électeur peut vous être funeste
Il vient.
Le gouverneur
Tant de prudence entraîne trop de soin.
Je ne sais pas prévoir l’Electeur de si loin.
Qu’il approche, s’il veut, ma ville est préparée
A soutenir du moins quatre jours de tranchée.
Rejoignez donc, Seigneur, votre détachement.
M. de Thiers
Je pars, mais, entre nous, je ne suis pas content.
Arsenal 3128, f°320r-320v