Brevet de Madame Ulric

Comme l’amour et la folie,

Quoiqu’en puissent dire les sots,

Sont de véritables pivots

Sur lesquels roule notre vie,

Et que pour remplir ces deux points

Le beau sexe met tous ses soins,

Nous, généraux de la Calotte,

Sur le témoignage public,

Parmi la gent porte-marotte

Incorporons la dame Ulric

À qui l’aimable La Fontaine

Communiqua ses doux trésors

Et les derniers fruits de sa veine

Avant que d’aller chez les morts,

Trésor dont, par reconnaissance,

Elle a fait présent à la France,

Dans un livre où l’on voit son cœur

Si fort pencher pour ce rimeur

Ainsi qu’il paraît par maint conte

Où la déesse d’Amathonte

Est peinte avec de plus beaux traits

Que dans aucun de ses portraits,

Fût-ce par le pinceau d'Apelle

Ou le ciseau de Praxitèle.

À ces causes, nous faisons don

À ladite Ulric du cordon

De notre ordre, et par la présente

Comme écolière et comme amante

De Fontenelle, la créons

Le chef de toutes les coquettes

Qui sont éprises des poètes.

Lui donnons pour revenants bons

La gloire légère et fumée

Qui suit pareille renommée

Défendons à tous partisans,

Maltôtiers et pareilles gens

De corrompre avec leurs richesses

Ces regrattiers du Permesse

Sous peine de servir en vers

De jouet à tout l’univers

Et d’éprouver notre disgrâce,

Nous déclarant ouvertement

Les vrais protecteurs du Parnasse.

Fait au Conseil du Régiment.