Description calotine des décorations de Paris à l’entrée de l’Infante
Description calotine des décorations de Paris
à l’entrée de l’Infante
Pour répondre à la juste attente
Des académiques esprits
Qui pour faire honneur à l’Infante
Ont si bien décoré Paris,
Écoutez, troupe calotine,
Cette description divine.
Le felici adventui
Des savants a bien réjoui,
Car les uns, de goût antiquaire,
Voulaient qu’en style lapidaire
Lutetiae fût au datif,
Pendant que les gens de collège
Le voulaient à l’accusatif
Par la règle et le privilège
Que la question que par quo
Exige le cas in quarto.
Sur le Châtelet, prison noire,
On voyait l’étoile du jour
Qui, venant nous faire sa cour,
Nous apportait honneur et gloire.
Cet astre venait tout de go
D’Espagne orditur ab austro.
La Seine au pont de Notre-Dame
Disait ce beau vers, votivas
Cum nimphis exhibetundas,
Et désirait fort dans son âme
Que l’Infante voyant son eau
En eût voulu boire un bon seau.
Pour l’arc de la Feronnerie,
Heureuse était l’allégorie :
Un grand navire et son fanal
Annonçait un repos banal
Tant à l’Espagne qu’à la France
Et les auteurs par élégance
Pour désigner un si grand jour
Avant l’hymen mettaient l’amour,
Trouvant chose trop erronée
Qu’Amour confirma l’hyménée
Et qu’on eût mis en lettres d’or
Jungit hymen striget amor.
Mais leur chef-d’œuvre allégorique,
Quoique par trop hyperbolique,
Est la grenade qui nutrum
Voulait en latin maturum
Au lieu de matura, mais comme
En langue française une pomme
De grenade est du féminin,
Ils ont corrigé le latin.
En un mot, au haut de la rue
D’où le Louvre s’offre à la vue,
On lisait ces quatre grands mots
Dis genita genitura deos
Que le galant courrier Mercure
Portait à la race future.
Sur ce, tout bien considéré,
Le conseil a délibéré
D’assurer à l’académie
Des royales inscriptions,
Et du mauvais goût ennemie,
Privilèges, exclusions,
Afin qu’aucun autre ne puisse
Profaner ce bel exercice.
Lui donnons pour gages et droits
Les brouhahas qu’à pleine voix
Les étrangers et régnicoles
Donnent à leurs belles paroles.
Commettons de Boze et Matour
Tant à la ville qu’à la cour
Pour tenir la main aux présentes
Comme étant des plus importantes
Pour soutenir dans son éclat
Ce bon goût qui deviendrait plat
Et qui ferait honte à la France,
Si par une expresse défense
Nous n’assurions à ce grand corps
Tant à présent comme pour lors
Les immunités et franchises
Pour la fabrique des devises,
Honneur qu’il a bien mérité
Par sa belle latinité.
Lyon BM, MS 750, f°245r-246r - Lyon BM, MS 751, f°94v-95v