Calotte de M. d'Herlac
Nous, Généraux de la Calotte,
À toute gent porte-marotte,
Savoir faisons, de par Momus,
Que les peuples étant émus
Sont de très dangereuses bêtes
Et que ce monstre à plusieurs têtes
Peut causer de terribles maux,
À moins qu’un guerrier plein d’audace,
En sage, par de doux propos,
Ne calme aveugle populace.
À ces causes, ayant appris
Que ces jours passés dans Paris
Une troupe de revendeuses,
Couturières et ravaudeuses
Avec quelque trente laquais
S’étaient abouchés tout exprès
Pour empêcher qu’un domestique
Ne souffrît en place publique
Deux ou trois heures de carcan,
Peine due à son insolence,
Et faisaient un si grand cancan
Que la capitale de France
Aurait péri si par sa valeur
D'Herlac n’eût paré ce malheur
En fusillant par ses fenêtres
Femmes, filles, garçons et maîtres,
Jusque là que dans un tel choc,
Malgré sa profession sainte,
Périt le bedeau de Saint-Roch
Et femme de six mois enceinte,
Tellement le susdit Barac
Sut tirer ab hoc et ab hac
Sur ceux qui passaient dans la rue
Pour dissiper cette cohue.
Or, manquant de fonds assez gros
Pour récompenser ce héros,
Nous remettons à la prudence
De ses Magnifiques Seigneurs
De lui décerner des honneurs
Convenables à sa vaillance
Ainsi qu’au service rendu,
Sans lequel tout était perdu.
Invitons le corps helvétique
D’exprimer par preuve authentique
À toute la postérité
Combien pareille boucherie
Fit plaisir à Leurs Seigneuries,
D’autant que par sa qualité,
Égale à la maison d’Autriche,
Ledit Seigneur D'Herlac se fiche
De tout le peuple de Paris,
Peuple très digne de mépris
Et qui mérite qu’on le berne.
Exhortons le peuple de Berne
Et de tous les autres cantons,
Qui sont plus doux que des moutons,
De couronner de bonne grâce
Ce héros qui, chassant de race,
Plus superbe que les Tarquins
Traite les peuples de faquins.
Fait ce dix-huitième novembre
Dans notre calotine chambre
Et le jour que D'Herlac si fier
Ne tira point de poudre en l’air.