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Ode

                        Ode
Quels nouveaux traits Phoebus m’inspire ?
En vain voudrai-je résister.
Je suis dans le sacré délire ;
Dieu des vers, tu vas me dicter
Les horreurs, les brigues, les crimes,
Les abominables maximes
D’un sacrilège corrupteur.
Puisque c’est ton feu qui m’enflamme,
Commence à découvrir la trame,
Ôte le masque à l’imposteur.

Dieu, sous quelle funeste étoile
Vit le jour cet homme pervers !
Peut-il se montrer sans ce voile
Qui le cachait à l’univers ?
Fuis, Girard, avec ton complice,
Dérobe ta tête au supplice
Que tu méritas tant de fois.
Tu m’ignores par la retraite
Que ta Société s’est faite.
Va gâter le cœur des Chinois.

Là, foulant aux pieds nos mystères,
Méprisant nos plus saintes lois,
Dis-leur que le Dieu de tes pères
N’a point d’oreille ni de voix.
Ton profane christianisme
Vaut bien moins que leur paganisme.
Fais de Baal ton créateur,
L’idole que ton bras encense
T’en donnera la récompense.
Un mandarin vaut un recteur.

Funeste auteur de ton scandale
Qui courut pour le détourner,
Voluptueux Sardanapale,
Fallait-il nous le ramener ?
Mais de ta bouche enchanteresse
Dont le venin est plein d’adresse
Sortit toujours un air fatal.
Non, jamais ta langue exécrable,
De désordre insatiable,
Ne s’employa que pour le mal.

Quel affreux mélange de crimes
Ne voit-on pas dans ces deux cœurs ?
De l’Enfer les sombres abîmes
N’ont jamais caché tant d’horreurs ;
L’inceste, le noir sacrilège
Sous les yeux de cet apostat,
Le poison dans leurs mains perfides
Anticipant les homicides
Augmente encore cet attentat.

Les chastes filles de Mémoire,
Gaufridy, t’éterniseront.
Je vois les lauriers dont l’histoire
En ceindra ton auguste front.
C’est le seul devoir qui t’anime,
Ton zèle nous montre le crime
Sous ce dehors plein de douceur.
C’est toi qui démasque l’impie
Portant comme l’hypocrisie
Le Ciel aux yeux, l’Enfer au cœur.

Abhorrant les âmes vénales
Qui dans ce siècle corrompu
À leurs pratiques infernales
Immolent jusqu’à la vertu,
Tu nous prouves que le vrai sage,
Affrontant le plus noir orage,
Est incapable de plier.
Inébranlable à tout rencontre,
Lorsque la vérité se montre
Il sait tout lui sacrifier.

Parlez dans ce sénat terrible,
Défenseurs de la vérité.
Que votre langue incorruptible
Soit fatale à l’impiété.
Élevez vos voix respectables :
Par vos raisons irréfragables
Le public est trop convaincu.
Achevez le procès au vice
Faites que l’orgueilleux périsse
Dans l’horreur, comme il a vécu.

Persécuteur de l’innocence,
Intriguant calomniateur,
Voici le jour de la vengeance.
Crains le bras exterminateur ;
Parfait imitateur des brutes
Tous tes pas ont été des chutes ;
Dieu te frappa d’aveuglement.
Tes crimes passent la limite,
J’aperçois la tête proscrite
Toucher à son dernier moment.

 

Numéro
$1944


Année
1731




Références

F.Fr.23859, f°36r-37v - BHVP, MS 602, f°187r-188r - Turin, p.80-84