Arrêt de la basoche
Arrêt de la Basoche1
Nous, chancelier, garde des Sceaux,
Ordonnons à tous les suppôts
Du royaume de la Basoche
De faire en nos mains le serment
De vivre clercs comme de roche,
Et fidèles au Parlement.
A tous clercs il est défendu
D’entrer chez les avocats du,
Parce qu’étant d’expérience
Que tels maîtres, tels compagnons,
Ils apprendraient sous cette engeance
A devenir maîtres fripons.
Déclarons ne faire aucun cas
De ces trois classes d’avocats
Que quatre mendiants on nomme,
Les ving-thuit et les promoteurs ;
L’avocat devant être un homme
Bon, pur, fidèle et plein d’honneur.
Permettons de faire imprimer,
De publier et d’afficher
Partout la présente ordonnance ;
Enjoignons à notre greffier
D’en remettre, par déférence,
Un exemplaire au bâtonnier.
- 1« Les discussions entre les subalternes du Palais ne sont pas encore apaisées : c’est ce qui a donné lieu à la facétie ci‑dessus, toujours bonne seulement comme pièce historique. Il faut savoir, pour son intelligence, que la Basoche est un petit tribunal érigé en l’honneur des clercs de procureurs où ils siègent et jugent certaines causes. Cette institution remonte à l’ancien temps et se ressent du génie romanesque d’alors, car il y a ce qu’on appelle le Roi de la Basoche, il a son chancelier, etc. Il a une sorte de discipline sur sa troupe. » (Mémoires secrets.) - Lors de la suppression de l’ancien Parlement, en 1771, la plupart des avocats ayant cessé leurs fonctions, le chancelier les fit remplacer par des procureurs, qui se trouvèrent dans une situation embarrassante, après la destruction du Parlement Maupeou. « Tous les procureurs au Parlement, écrit Hardy, à l’exception néanmoins de ceux qui étaient devenus avocats au Parlement en 1771, s’assemblèrent à la chambre Saint-Louis… Ils arrêtèrent unanimement de ne faire aucune signification quelconque à ceux de leurs confrères qui avaient exercé les fonctions d’avocat du, comme aussi de ne répondre à aucunes de celles qui pourraient leur être faites par quelqu’un d’eux, bien instruits qu’ils étaient que les présidents ne leur accorderaient point d’audience, et ce jusqu’à ce qu’ils eussent rapporté leurs provisions, qu’ils eussent renoncé formellement à leur état d’avocat et qu’ils eussent été réintégrés dans le corps en la forme prescrite. » L’ordre des avocats n’était guère plus calme, au dire du même auteur : « Il régnait au Palais beaucoup de division, soit entre les procureurs au Parlement qui avaient été supprimés, et les avocats du redevenus leurs confrères, soit entre les avocats au Parlement de toutes les classes, savoir les purs, les sermentés, les soumis et les vingt-huit, et que ces derniers n’avaient encore pu parvenir à s’accorder que sur un seul point, celui de ne communiquer en aucune manière avec l’avocat Linguet. »
Raunié, IX,49-51 - Mémoires secrets, V, 720-21