L'Abbé Hocquart
L’abbé Hocquart1
Lorsqu’en France on battait la caisse
Pour y trouver des magistrats,
Certain abbé, fendant la presse,
Fut un des premiers candidats.
C’était suppôt de cathédrale,
Plus fait pour la table et le jeu
Que pour occuper un froid stalle,
Bon seulement à prier Dieu.
Il faut bien faire un sacrifice
Pour croître de deux mille francs
Le revenu du bénéfice
Et du piquet et des brelans.
Plein d’une si belle espérance,
Au son de l’or, notre abbé part,
Arrive au chancelier de France :
On annonce… l’abbé Hocquart.
Ton nom, dit Maupeou, m’extasie :
C’est celui du fameux Hocquart2
!
A sa place, malgré l’envie,
Tu seras, fusses-tu bâtard.
Des dispenses recommandées
On t’expédiera dans ce jour,
Bien et dûment enregistrées
Par gens de ma nouvelle cour.
Un préambule est nécessaire :
As-tu bien été baptisé ?
Oui, monseigneur, la chose est claire ;
Claude est le nom qu’on m’a donné.
Notre cher féal, et bien Claude3
,
Puisqu’il appert à tout voyant
Que tu l’es vraiment et sans fraude,
Reçois-en notre compliment.
Pour de notre gent moutonnière
Juger procès mus, à mouvoir,
Te dispensant de la prière,
Et par-dessus, de tout savoir.
Savoir faisons4
aux bêtes champenoises
Que par dessein et non pas par mégard,
Nous nommons, pour juger toutes leurs noises,
Notre féal Claude et bien Claude Hocquart.
- 1Chanson à l’occasion de la commission de conseiller au conseil supérieur de Châlons, sollicitée et obtenue par l’abbé Hocquart, chanoine de Châlons. (M.) (R)
- 2L’un des présidents de la deuxième chambre des requêtes du Parlement de Paris, exilé le 24 janvier. (R)
- 3Les provisions de chancellerie portent toujours : Notre féal et bien‑amé.
- 4[le dernier couplet doit être chanté sur l'air Folies d'Espagne selon les Mémoires secrets (R)
Raunié, VIII,219-21 - F.Fr.13652, p.162-65 - Mémoires secrets, III, 1487-488