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Aux railleurs d’Angleterre

Aux railleurs d’Angleterre1
Ces braves insulaires
Qui sont, qui font sur mer les corsaires ;
Ailleurs ne tiennent guère.
Le Port-Mahon est pris,
Il est pris, il est pris, il est pris, il est pris.


Ils en sont tout surpris ;
Il est pris, il est pris.
Ces forbans d’Angleterre,
Ces fous, ces fous, ces foudres de guerre,
Sur mer comme sur terre,
Dès qu’ils ont combattu,

sont battus, sont battus, sont battus.

Anglais, vos railleries,
Ces traits, ces mots, ces plaisanteries
Seraient-elles taries,
Seriez-vous moins plaisants,
A présent, à présent, à présent, à présent ?


Raillant et combattant,
L’Anglais vaut tout autant,
Avec les mêmes grâces,
Il rit, défend, et rend ses places,
Ses bons mots, ses menaces
Ont les mêmes succès,
A peu près, à peu près, à peu près, à peu prés.

Beaux railleurs d’Angleterre,
Melun, Nogent, le coche d’Auxerre
Ont, pendant tout l’été,
Résisté, résisté, résisté, résisté.


Ils les ont maltraités,
Ils les ont écartés.
Notre flotte d’eau douce
Vous voit, vous joint, vous combat, vous repousse,
Et jusqu’au moindre mousse,
Tout est sur nos bateaux
Des héros, des héros, des héros, des héros.

Plein d’une noble audace,
Richelieu presse, attaque une place ;
Et d’abord il terrasse
Ses ennemis jaloux,
Sous ses coups, sous ses coups, sous ses coups.
Ni portes, ni verrous
Ne parent à ses coups.
Sans se servir d’échelles,
L’honneur, l’amour lui prêtent des ailes.
Bastions et ruelles
Il emporte d’assaut,
De plein saut, de plein saut, de plein saut, de plein saut2 .

  • 1 - Autres titres : Sur la prise de l'île de Minorque par M. Collet [Collé](F.Fr.10479) - Chanson sur la prise de Port-Mahon, par Collé. (M.) — Charles Collé, chansonnier et auteur dramatique (1709-1783), l’un des fondateurs du Caveau, était secrétaire et lecteur du duc d’Orléans. La chanson que nous publions lui valut de Louis XV une pension de 600 livres. Il écrit à ce sujet dans ses curieux Mémoires : " Au mois de juillet, je fis les couplets sur la prise de Port-Mahon, qui ont couru à la ville et à la cour avec une rapidité et un succès singuliers. La joie étonnante et si peu attendue où l’on s’est trouvé à la prise de cette place leur a donné cette vogue prodigieuse qu’ils ont eue… Voici au reste la première fois que j’ai l’honneur d’être chanté par les chantres des rues ; honneur que je préfère à celui que ma chanson a eu d’être chantée par le Roi qui a, dit on, la voix fausse. Pour l’intelligence de ces couplets il est bon de dire que les Anglais, au commencement de cette guerre, avaient dans leurs papiers publics donné un état de la marine de France où ils mettaient les coches de Corbeil, d’Auxerre, le Villeneuvier, la galiote de Saint Cloud, le bac d’Asnières." (R).
  • 2Ce dernier couplet a été biffé par Collé qui a écrit au bas les mots suivants : « Ce dernier couplet n’est pas de moi ; il est sans doute du garçon imprimeur qui a fait graver cette chanson. Il ne me serait jamais tombé dans l’esprit de louer le maréchal de Richelieu. Je ne loue ni ne satirise. »

Numéro
$1154


Année
1756 Août

Auteur
Collé



Références

Raunié, VII,270-73 -Clairambault, F.Fr.12721, p.105-07 - F.Fr.10479, f°519 - F.Fr.15136, p.299 - BHVP, MS 555, f°92r - Mazarine Castries 3989, p.460-62 (moins le dernier couplet) et 487-89 - Collé, Correspondance, p.19-21 - CLG [éd.Kölving], III,184-86 - Mannheim, II,2, p.551-52 - Barbier-Vernillat, III, 150


Notes

Mise au point dans CLG, III,184, note 29.