Le Lyrique sérieux et comique
Le lyrique sérieux et comique1
Le lyrique est partagé
Et par deux chefs dirigé,
Voilà la ressemblance.
Le comique sagement2
L’héroïque plaisamment3
Voilà la différence.
Ces spectacles languissants
Paraissent convalescents,
Mais du tombeau l’un d’eux sort,
L’autre est mourant s’il n’est mort.
Les deux chefs en hommes fins
Veulent aller à leurs fins ;
Mais l’on voit que par le nez
L’un mène, l’autre est mené.
Tous deux, pour plaire au public,
Se mettent à l’alambic ;
Mais Monet sait ce qu’il fait,
Bernage fait ce qu’il sait.
Chacun d’eux fait ce qu’il peut,
Et ne fait pas ce qu’il veut,
L’un et l’autre est indigent,
L’un d’esprit, l’autre d’argent.
Chacun d’eux est absolu
Dans ce qu’il a résolu ;
L’un sans conseil est un grec,
L’autre un imbécile avec.
L’un et l’autre cependant
S’est pourvu d’un confident ;
L’un de Rebel prend le ton4
,
L’autre le donne à Rabon5
.
Chacun prend soin de loger
Son héros ou son berger,
Voilà la ressemblance.
Palais de fée à Lucas6
,
Galatée au galetas,
Voilà la différence.
- 1 - Autres titres : A propos de l’Opéra et de l’Opéra-Comique. (M.) (R) - Sur M. le prévôt des marchands et Monnet Chanson sur l'opéra lyrique
- 2Jean Monet, auteur et directeur dramatique, avait pris une première fois, en 1743, la direction de l’Opéra-Comique, qu’il fut bientôt obligé d’abandonner. En 1752, il obtint l’agrément du Roi pour le rétablissement de ce théâtre, fermé depuis plusieurs années, et l’exploita avec succès. (R)
- 3La ville de Paris avait pris dès le mois d’août 1749 la direction de l’Opéra, qui se trouvait ainsi sous la dépendance du duc de Gesvres, gouverneur de Paris, et surtout du prévôt des marchands Bernage. (R)
- 4Rebel mène le prévôt des marchands comme il veut. (M.) (R)
- 5 Actrice de l’Opéra‑Comique maîtresse de Monet. (M.) (R)
- 6Rebel loge au magasin de l’Opéra. (M) (R)
Raunié, VII, 215-217 - F.Fr.10479, f°183r-184r - Arsenal 4844, f°245r - BHVP, MS 651, p.62-66 - BHVP, MS 662, f°60v-61v - Lille BM, MS 67, p.265-68