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Vive les gueux

Vive les gueux1
Grâce à monsieur de Bernage,
On va bientôt
A maint joli pucelage
Donner l’assaut ;
Six cents, c’est le nombre heureux ;
Vive les gueux !

Pour entrer dans cette bande,
Chaque pasteur
A chaque fille demande
Son fréquenteur2  ;
Le mot est neuf et nerveux.

Deux cents écus font les dots
De ces tendrons,
Y compris habits et cottes,
Vins et dindons,
Et même les violoneux3 .

Fais bien nettoyer les rues,
Cher Outrequin4 ,
De peur que nos prétendues
Par les chemins
Ne gâtent leurs souliers neufs.

Qu’il fera beau, ce me semble,
Voir en ce jour
Tant d’amants unis ensemble
Faire à l’amour
Un sacrifice joyeux

Pour contempler cette fête,
De l’Opéra,
Notre prévôt, bonne tête,
Régalera
Ce bataillon d’amoureux.

Sur un si louable exemple,
De nos deniers
A l’Hymen fondez un temple,
Gros financiers,
A nos dépens généreux5 .

Vive monsieur de Bernage,
Et son conseil,
Vive ce prévôt si sage
Au teint vermeil,
Et pour terminer nos vœux,
Vive les gueux !

  • 1autre titre : Chanson à l'occasion du mariage des filles de Paris faits par la ville (Arsenal 2964, F.Fr. 10478)
  • 2« Les curés de Paris sont chargés de choisir, dans leurs paroisses, de pauvres filles et des garçons qui sachent gagner leur vie, et l’on doit les marier tous, dans chaque paroisse de Paris, à une même messe. » (Journal de Barbier.) (R)
  • 3« La Ville a envoyé d’abord à chaque curé, suivant le nombre de mariages accordés à chaque paroisse, du drap pour les habits des garçons et des étoffes rayées, soie, fil ou coton, pour les robes des filles ; le tout de différentes couleurs, afin d’éviter un uniforme d’habillement reconnaissable dans les rues. Elle a ensuite délivré aux curés, en argent, une somme de 369 livres pour chaque mariage. Les souliers, les bas, les chapeaux, gants, bouquets, le linge, chemises, garnitures, manchettes avaient été aussi fournis par la Ville ; ce sont les curés qui se sont chargés de ces petits détails, d’avoir une salle pour rassembler leurs noces, de commander le repas et tout le reste. » (Ibid.) (R)
  • 4Entrepreneur des fontaines et du pavé de Paris. (M.) (R)
  • 5« L’exemple de la ville de Paris fut suivi dans plusieurs provinces du royaume par quelques corps et communautés qui voulurent faire leur cour au Roi. La marquise de Pompadour saisit cette occasion de faire du bien : elle dota et maria dans ses terres toutes les filles nubiles. M. de Monmartel, garde du trésor royal, en fit autant. »

Numéro
$1108


Année
1751 9 octobre (F.Fr. 10478)




Références

Raunié, VII,194-96 - F.Fr. 10478, f°645-646 - F.Fr.15155, p.73-77 - Arsenal 2964, f°79r-80v - BHVP, MS 661, f°137r-128r