Le Benedicite de monseigneur de Vintimille
Le Benedicite de monseigneur de Vintimille1
Ouvrons les yeux, levons la tête,
Le temps d’abomination
Que Dieu prédit par son prophète
Vient de paraître dans Sion.
Ecce.
Des ministres, dont le faux zèle
Ne tend qu’à détruire la loi,
Prêchent la morale nouvelle
Et tâchent d’éteindre la foi
Nunc.
Un prélat sans inquiétude
La met dans un très grand danger ;
Et fait sa principale étude
De savoir bien entonner
Benedicite.
Disciple des enfants d’Ignace,
Il croit que l’on peut se sauver
Sans avoir besoin de la grâce
Et sans être obligé d’aimer
Dominum.
Il veut que dans son diocèse
On suive, sans examiner,
Une doctrine si mauvaise,
Sinon il ferait exiler
Omnes2
.
Entêté des fausses maximes,
Il commence à persécuter
Des docteurs qui n’ont d’autres crimes
Que de vouloir toujours rester
Servi Domini.
Vous en rendez bon témoignage,
Vous qu’il tâche à remercier,
Que ne met-il pas en usage
Pour vous faire tous succomber,
Qui statis.
Mais par un courage héroïque
Et des discours pleins de ferveur,
Vous confondez ce politique
Qui voudrait bien semer l’erreur
In domo Domini.
Semblables aux premiers fidèles,
Vous êtes prêts à endurer
Les morts même les plus cruelles
Plutôt que de scandaliser
In atriis domus Dei nostri
Jaloux du salut de vos frères,
Vous voulez en eux confirmer
La foi qu’ont enseignée vos pères
Et les empêcher de marcher
In noctibus.
Ah ! quel bonheur pour vous, fidèles,
D’avoir de si grands défenseurs,
Tâchez de répondre à leurs zèles ;
Mais pour l’obtenir du Seigneur,
Extollite manus vestras.
Suivez toujours ces guides sages
Qui, bien loin de vous égarer,
Sauront plutôt vous préserver
De l’erreur et de l’esclavage.
Benedicite Dominum.
Et toi, prélat, qui, sans scrupule,
Exerces tant de cruautés
Pour faire accepter une bulle
Si contraire à la vérité,
Benedicat te Dominum.
Loin de faire tant de ravage,
Tu devrais plutôt imiter
Les vertus des saints personnages
Que tu t’efforces d’éloigner
Ex Sion.
Car ta conduite et ta morale
Scandalisent fort aujourd’hui :
Or, en matière de scandale,
Tu sais quel malheur pour celui
Qui fecit.
Mets donc ordre à ta conscience,
Éloigne de toi les flatteurs
Qui pourraient causer ton malheur,
Veux-tu perdre par complaisance
Cœlum.
Hélas ! que je plaindrais ton sort
Si tu n’avais pour l’autre vie
D’autre appui que leurs passeports
Quand il faudra quitter la vie
Et terram.
Raunié, V,270-74 - Clairambault, F.Fr.12700, p.137-40 - Maurepas, F.Fr.12632, p.123-26 - F.Fr.9352, f°271v-273v - F.Fr.10475, f°277-278 - F.Fr.12800, p.268-71 - F.Fr.15144, p.53-58 - NAF.2483, p.187-88 - Arsenal 2962, p.405-10 - Arsenal 2975, p.14-17 - Arsenal 2976, p.131-35 - Arsenal 3133, p.286-90 - BHVP, MS 602, f°68r-69r