Un circoncis pour me baiser1
M'offre mainte pistole.
Si j'allais le lui refuser,
Ce serait être folle ;
Allons, Francœur,
Point de rigueur,
Il faut que je me rende.—
Eh bien ! Manon, rendez-vous donc,
Mais partageons l'offrande.—

Il est vrai que pour mes appas2
Un circoncis soupire
Et que j’ai reçu maints ducats
Pour calmer son martyre
Quellle horreur ! certain me dira,
Qu’un juif vous entretienne.
Il est juif tant qu’on voudra,
Mais sa bourse est chrétienne.

Oui, de bon cœur j’aime Francoeur
Et j’aime la pistole.
J’ai résisté, on m’a payé,
C’est bien jouer mon rôle.
Fières beautés qui m’écoutez,
Vous marchandez de mine
Il n’en est point
Qui du rabbin
Ne deviendrait rabbine

Je consens que de mes ducats
Francœur entre en partage ;
Mais, si de tes charmants appas
Il fait encore usage,
Ma Pélissier,
Sans nul quartier
Je le fais circoncire.—
Fi donc, rabbin,
C'est son engin
Qui m’a servi de lyre.

• 1Une actrice de l'Opéra nommée Pelissier avait pour galant un nommé Francoeur, musicien, qu'elle quitta pour se donner à un juif. On fit à ce sujet la chanson qui suit (Pélissier était le mari de cette actrice. Et elle s'appelait Manon étant fille) (Arsenal 2976)
• 2Les deux couplets suivants ne se trouvent que dans Castries