Recherche de la béquille du Père Barnabas

Enseignez-moi qui l’a.

Nommez-moi la friponne.

À celle qui l’aura

D’avance je pardonne.

J’ai perdu ma béquille,

S’écria Barnabas.

Qui est l’honnête fille

Qui la rapportera ?

Dans chaque carrefour

Pour un bijou si riche

Qu’on batte le tambour,

Que partout l’on affiche

N’est-ce point quelque fille

Des chœurs de l’Opéra

Qui retient la béquille

Du Père Barnabas ?

La serrant dans sa main

Une jeune novice

S’étonnant que soudain

Ailleurs elle ne se glisse,

Est-ce donc une anguille,

Mon Dieu, dit-elle, où va

Se fourrer la béquille

Du Père Barnabas ?

Une dame de Cour

S’en étant emparée

Fit languir plus d’un jour

La bourgeoise sucrée

……………………

Pour ces espèces-là

Qu’est faite la béquille

Du Père Barnabas.

On s’en sert en tout temps

Dans ce couvent de filles.

C’était le passe-temps

Des novices gentilles.

On élargit la grille

De l’Ave Maria

Pour passer la béquille

Du Père Barnabas.

Le Père Barnabas

Chez une janséniste

Enfin la retrouva,

Mais, dit-il d’un air triste,

Pour une sainte fille

Voyez en quel état

Vous rendez la béquille

Du Père Barnabas.

Le démon de la chair

Sans cesse m’aiguillonne

Disait à un pater

Une gentille nonne

Il faut, dit-il, ma fille,

Chasser ce démon-là

A grands coups de béquille

Du Père Barnabas.

En amour un peu grec

Un père de famille

Redoutant quelqu’échec

À l’honneur de sa fille

D’un seul coup de faucille

Au pantalon coupa

Les glands de la béquille

Du Père Barnabas.

Un jour l’homme de bien

Confessant une fille,

Par forme de maintien

Elle prit sa béquille,

Et de fil en aiguille

À son Mea Culpa

Elle tira la béquille

Du Père Barnabas.

Qui fait vivre à Paris

Quantité de fillettes,

Qui donne des habits

À deux mille soubrettes,

Qui soutient la famille

Des filles d’Opéra,

N’est-ce pas la béquille

Du Père Barnabas ?

Aux pieds d’un cordelier

Une jeune fillette

Dit, voyant frétiller

Le long de sa jaquette,

Dessous votre mantille,

Qu’est-ce qui remue là ?

C’est, dit-il, la béquille

Du Père Barnabas.

Je sens un monument

Qui donne à la nature,

Dites-moi franchement,

Certain êtes-vous sûre ?

Mais, malgré vos appas,

Je crains pour la béquille

Du Père Barnabas.