Sans titre
Charmant La Chétardie1 ,
Objet de tous mes vœux,
Diffère, je t’en prie,
Encore un jour ou deux.
Cruelle départie
Malheureux jour !
Que ne suis-je sans vie
Ou sans amour.
Pour monter sur le trône,
Tu m’as prêté les mains ;
Pour garder ma couronne
J’ai suivi tes desseins.
Cruelle départie
Malheureux jour !
Que ne suis-je sans vie
Ou sans amour.
Prends par reconnaissance
Ces roubles, ces doublons ;
Pour pleurer ton absence
Dieux ! que j’ai de raisons !
Cruelle départie
Malheureux jour !
Que ne suis-je sans vie
Ou sans amour.
Je prends ton équipage,
Mais reçois ce portrait
Comme un précieux gage
De mon amour parfait.
Cruelle départie
Malheureux jour !
Que ne suis-je sans vie
Ou sans amour.
Souviens-toi de ta reine,
Aimable ambassadeur,
Rappelle-toi la peine
Que va souffrir mon cœur.
Cruelle départie
Malheureux jour !
Que ne suis-je sans vie
Ou sans amour.
- 1On prétend que la czarine Élisabeth Petrowna aimait le marquis de la Chétardie, ambassadeur de France auprès d’elle, et qu’il n’a pas peu contribué à l’élever au trône. Il vient d’avoir son audience de congé ce mois de septembre 1742.
Mazarine Castries 3988, p.118-20