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Couplets sur le voyage du Pape à Vienne

Couplets sur le voyage du Pape à Vienne

 

Ô merveilles ! ô surprise !

Le prodige est nouveau.

Quoi le chef de l’Église

Délaisse son troupeau !

Cessons d’être étonnés s’il court la pretentaine :

Du bon pasteur suivant l’avis,

S’il ne peut sauver la brebis,

Il veut au moins la laine.

 

Quittant sa Babylone,

Il s’est mis en chemin ;

La tiare à la couronne

Le cède donc enfin !

Ces pontifes jadis, pleins d’orgueil et d’audace

Aux rois mêmes osaient commander.

Maintenant, au lieu d’ordonner

Ils vont demander grâce.

 

Sans frein et sans décence,

Ils déposaient les rois ;

Fiers de leur impudence,

Ils renversaient les lois.

Dignes et plats valets de ces maîtres sinistres,

Tous les moines et les abbés,

Affermissant les préjugés,

Leur servaient de ministres.

 

La fronde et l’imposture

Cimentaient leur pouvoir.

Outrageant la nature,

Trahissant leur devoir,

Ces tonsurés hardis, du haut du Capitole,

Sur l’univers voulaient régner

Et l’on courait s’agenouiller

Aux pieds de cette idole.

 

De ces temps d’ignorance

Plaignons l’aveuglement.

La raison, la science

Se taisaient en pleurant.

Du fanatisme affreux la vile et lourde masse

Abrutissait tous les esprits ;

Mais dans ce siècle on a remis

Chaque chose à sa place.

 

Du pape misérable

Le pouvoir est usé.

C’est un chef méprisable

D’un culte méprisé.

Sur la religion, la raison docte et sage

Enfin a dessillé nos yeux,

E les prêtres n’ont plus pour eux

Que le libertinage.

 

Successeur ridicule

De ces tyrans mitrés,

Et vous, et votre mule

Serez vilipendés.

L’intrépide Joseph ayant chassé les capuchons,

Ennuyé de vos sots sermons,

Vous chassera lui-même.

 

Ô sagesse profonde !

J’admire les décrets

De ta bonté féconde

Nous sentons les effets

La fin d’un double joug : tu délivres le monde.

L’Anglais et le Pape aux abois

Nous laissent libres à la fois

Sur la terre et sur l’onde.

Numéro
$7982


Année
1783




Références

F.Fr.13653, p.301-04