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Brevet pour le Sr***

Brevet pour le Sieur**

De par le dieu de la Calotte,

Nous, généraux de la Calote,

Qui n’avons jamais installé

que des gens de cerveau fêlé

Dans les charges, honneurs et grades

De notre auguste Régiment,

Ayant besoin pour nos malades

D’un médecin qui hardiment

Par la saignée si applaudie,

En peu de temps les expédie,

Système ou selle à tous chevaux

Qui guérit souvent de tous maux.

Et la dame de B***

Que toute la calotte honore

Nous en ayant proposé un

Qui se croit à moitié défunt [? ].

Nous, loin de l’avoir refusée,

Avons reçu d’un cœur loyal

Ce digne sujet de risée

Reconnu pour original,

Ayant toute la nuit sa garde

À son chevet dans un fauteuil,

Et qui malgré le froid n’a garde

D’en sortir pendant qu’il clôt l’œil

Crainte d’interrompre le somme

D’un homme si cher au dieu Mome,

Qui de consommé seulement

Se nourrit, sans autre aliment,

Pas même une aile de volaille,

De perdreau, de guignard, de caille,

À cause que son estomac

Gouverne ab hoc et ab hac

De sa santé l’économie

Malgré toute sa prudhommie.

Mais tout hypocondre qu’il est,

Voulons, malgré son air benêt,

Que sans craindre le cocuage

Il prenne fille en mariage,

Âgée au plus de dix-neuf ans,

Quoiqu’il en ait au moins cinquante.

Et si l’on a des descendants

D’une race si excellente,

Nous donnons à son premier hoir

Le privilège et le pouvoir

De guérir seul du priapisme

Tous les soldats du calotisme.

Plus V… sera sur ses crans [?]

Peint en médecin tous les ans

Avec une prolixe barbe,

Et le surnommons suivant l’us

Des calotins le diafoirus.

Voulons qu’il épouse en décembre

La future et que sous son lit

Chacun d’eux ait cinq pots de chambre

Pour leurs besoins pendant la nuit,

Et le lendemain de la noce

Il puisse faire lit à part.

Si le feu d’amour le rend rosse,

L’épouse pourra tôt ou tard

Selon qu’elle en sera friande

Recevoir sourdement l’offrande

De quelque discret favori,

Le tout à l’insu du mari.

À ce docteur de la Marotte

Nous accordons triple calotte.

Pour appointements il aura

Tous les ans deux mil reales

Sur les salaisons fécales

De malades qu’il guérira.

Plus, même droit sur les urines

Et ce qui sort de leurs narines.

Fait en l’an mil sept cent vingt-six,

Le quinze décembre prefix.

Numéro
$4305


Année
1726




Références

F.Fr.9353, f°188r-189r - F.Fr.15015, f°201r-202v - Lille BM, MS 63, p.119-24