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Chanson toute nouvelle

Chanson bachique
Que Criton, cette mine noire
Pleure l’absence des ducats ;
Que le riche Atis fasse gloire
De se donner tous ses ébats,
Tous deux ils font merveille,
Tous deux ils ont leurs raisons ; mais moi
C’est du jus de la treille
Que je reçois la loi.

Qu’avec le casque et la rondache
Le guerrier brave le destin ;
Que sous le froc un dévot cache
Tous les vices du libertin,
Que les beaux yeux d’une Sylvie
Enflamment le jeune Alcidon,
Ou qu’à la mode d’Italie
Alexis plaise à Corydon,

Que d’Argenson de sa carrière
Ait terminé le trop long cours1  ;
Que d’Aguesseau, cette âme altière,
Nous promette de plus beaux jours,
Que le pape Clément, à Rome,
Fabrique de nouveaux rébus ;
Que le cardinal, habile homme,
En appelle comme d’abus,

Que Philippe, dans sa régence,
Philosophe avec nos écus ;
Que le Parlement s’en offense
Et plaigne ses droits confondus,
Tous deux ils font merveille,
Tous deux ils ont raison : mais moi
C’est du jus de la treille,
Que je reçois la loi.

  • 1Le 21 mai 1720 parut un arrêt qui réduisait tous les billets de banque à moitié de leur valeur, discréditant ainsi le papier et ruinant la nation. Il en résulta un tel trouble que le Régent dut le révoquer immédiatement, et lever la prohibition qui pesait sur les espèces. D’Argenson, soupçonné d’avoir rendu cet arrêt pour faire tomber Law fut disgracié, et le Régent rappela le chancelier d’Aguesseau de Fresne. « Law, dit Voltaire, lui porta la lettre de son rappel (7 juin 1720), et d’Aguesseau l’accepta d’une main dont il ne devait rien recevoir ; il était indigne de lui et de sa place de rentrer dans le conseil quand Law gouvernait toujours les finances. » (R)

Numéro
$0373


Année
1720




Références

Raunié, III,181-83 - Clairambault, F.Fr.12697, p.88-89 - Maurepas, F.Fr.12629, p.309-10