Brevet de pension accordé à Baron
De par le Dieu porte-marotte,
Nous, Général de la Calotte,
Persuadé très fortement
Que toutes choses dans la vie
Ne sont que farce et comédie,
Voulons que notre Régiment,
Imbu d'une telle maxime,
Ait du monde la même estime.
À ces causes, nous enrôlons
L'illustre, le fameux Baron.
Voulons qu'il mette sur la scène
Les héros de la vie humaine.
Quoique pourtant ledit Baron,
Qui, par je ne sais quel caprice,
Avait quitté cet exercice
Et même perdu son renom,
Méritât en bonne justice
D'être exclu de notre milice.
Cependant au bout de trente ans,
Étant rentré dans son bon sens,
Et reprenant pour nous complaire
Le cothurne et le brodequin,
On lui reconnaît l'esprit sain.
Malgré la pesanteur de l'âge,
Il fait encore le personnage
De jeune et galant amoureux,
Rôle très vif et vigoureux.
Tel il a, dans les Macchabées,
Représenté au naturel
L'aimable et jeune Misaël,
Qui n'a pas au plus quinze années.
Somme, pour en venir à bout
D'une manière plus exacte,
Il se fait raser à chaque acte,
Tant il aime à jouer de goût.
Or le tout vu, sur l'excellence
Dudit Baron dans son grand art,
Plus que sur sa haute prudence
Qui l'y fit retourner si tard,
Lui donnons mille écus de rente,
En espèce haute et sonnante
Sur tous les battements de mains
Et les brouhahas du parterre,
Où les plus sages des humains
Au mauvais sens livrent la guerre.
Défendons aux courtauds et clercs
De faire aucun bruit ni huées,
Surtout contre les Macchabées,
Dont la conduite et les beaux vers
Font la gloire du Sr. la Motte,
Tout ainsi que dudit Baron,
Auquel, outre double calotte,
Accordons notre grand cordon,
Avec papillons, girouettes,
Rats, souris, grelots et sonnettes,
Que nous donnons courtoisement
À tous héros du Régiment
Signé Torsac, Aymon présent.