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Sans titre

Rothelin1 , marquis étoffé

Pour éteindre sa flamme

S’en vient de prendre un réchauffé

Pour en faire sa femme.

Voyez la comique union

La faridondaine, la faridondon,

Le plaisant duc que voici

Biribi

A la façon de barbari

Mon ami.

Dès qu’au lit ils furent tous deux.

Monsieur, quoiqu’à mon âge,

Dit l’épouse, il soit bien douteux

D’offrir un pucelage,

Du mien pourtant je vous fais don

La faridondaine, la faridondon,

Jamais n’y toucha mon mari

Biribi

A la façon de barbari

Mon ami.

Le pauvre défunt impuissant

Me laissa toujours fille.

Il ne porta jamais de gland

A sa faible béquille.

Mais d’ailleurs il était si bon

La faridondaine, la faridondon,

Que je n’en ai jamais rien dit

Biribi

A la façon de barbari

Mon ami.

Vous qui me paraissez fourni

De bonne marchandise,

Faites l’office de mari.

Me voilà sans chemise ;

Prenez, tout est à l’abandon

La faridondaine, la faridondon,

Donnez-vous-en, mon cher ami,

Biribi

A la façon de barbari

Mon ami.

Le vaillant marquis aussitôt

Empoigne la pucelle,

D’un bond veut monter à l’assaut.

Mais las ! point de nouvelle :

Le haut fait bien sa fonction

La faridondaine, la faridondon,

Mais le bas fort mal obéit

Biribi

A la façon de barbari

Mon ami.

En deux mots voici la raison

Qui troubla l’alliance

Sans jambe et sans cuisse un rognon

Trompa son espérance.

Il ne put jamais, nous dit-on,

La faridondaine, la faridondon,

Garder l’équilibre en ceci

Biribi

A la façon de barbari

Mon ami.

Il veut appeler du secours

Pour le mettre en posture.

Mais à personne on n’eut recours

Pour finir l’aventure.

Vous en saurez l’invention

La faridondaine, la faridondon,

Écoutez bien et la voici

Biribi

A la façon de barbari

Mon ami.

Notre épouse qui pâtissait

D’une telle manœuvre

Et qui craignait que sans effet

Il abandonna l’œuvre,

Dit doucement à son barbon

La faridondaine, la faridondon,

A votre honneur sortons d’ici

Biribi

A la façon de barbari

Mon ami.

Monsieur le marquis, croyez-moi,

Sans vous mettre hors d’haleine

A ma place tenez-vous coi.

J’aurai toute la peine.

Je m’en vais faire le garçon

La faridondaine, la faridondon,

Et vous, faites la fille ici

Biribi

A la façon de barbari

Mon ami.

Ce qui fut résolu fut fait

La belle sur lui monte,

Lui fit diriger le bidet

En trois coups de bon compte

Il fut logé an la cloison

La faridondaine, la faridondon,

Quand je l’ai su, j’en ai bien ri.

Biribi

A la façon de barbari

Mon ami.

C’était du monde renversé

La vivante peinture.

Le pauvre homme, tout oppressé,

Soufflait outre mesure.

Sa moitié trouvant le jeu bon

La faridondaine, la faridondon,

De coups surchargeait le marquis

Biribi

A la façon de barbari

Mon ami.

Mais notre éclopé n’en peut plus

Et lui demande grâce.

Tes coups, dit-il, sont superflus,

Je deviens tout de glace ;

Je suis mouillé comme un poisson

La faridondaine, la faridondon,

Et de froid je me sens transi

Biribi

A la façon de barbari

Mon ami.

La Dame enfin, non sans regret,

Laissa là sa monture

Et le pauvre homme stupéfait

D’une telle aventure

Voulut changer cette façon

La faridondaine, la faridondon,

Je ne sais s’il a réussi

Biribi

A la façon de barbari

Mon ami.

  • 1Le marquis de Rothelin, à qui on a été obligé de couper la cuisse à la suite d’une blessure reçue à la guerre, épousa en 1739 Mme du Palais, veuve d’un officier de la maison du Roi. (Castries)

Numéro
$6088


Année
1739




Références

Mazarine Castries 3987, p.188-94