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La Colonisation de la Guyane

La colonisation de la Guyane1
Dans la rue de Richelieu,
En belle demeure,
Pas tout à fait au milieu,
Venez à toute heure ;
Dans l’île Cayenne allez,
Vous aurez, si vous passez,
Du pain et du beurre assez,
Du pain et du beurre.

On vous dit, mes chers enfants,
Tant garçon que fille,
Le Roi vous nourrit deux ans,
Aussi vous habille ;
On vous donne une maison
Et du terrain à foison,
Pour peupler cette île.

Dans ce superbe pays
Voyez quelle aisance,
Les cœurs y seront unis,
Comme ils sont en France ;
S’ils produisent des garçons,
Chacun du Roi ils auront
Grande récompense.

Sans cesser d’être Français,
Dans l’île Cayenne,
On sera des Cayennais
C’est chose certaine ;
Ceux qui prendront du souci,
On vous les ramène ici,
Ici de Cayenne.

Quantité de chevaliers
Partent pour Cayenne,
Comme beaucoup d’officiers
Que fortune mène.
Les plus riches reviendront
Et d’autres retourneront
De France à Cayenne.

Saintonge, beau régiment,
S’embarque sans peine,
Et débarque heureusement
Dans l’île Cayenne ;
Ils écrivent de là-bas,
Non, qu’ils ne regrettent pas
Les bords de la Seine, là,
Les bords de la Seine.

  • 1Brûletout de Préfontaine, ancien capitaine dans les troupes de la Guyane, avait proposé à l’administration des colonies un projet de colonisation que Choiseul accepta avec empressement, sans doute pour compenser les pertes subies au traité de Paris. De nombreux émigrants, séduits par les brillantes promesses qui leur étaient faites, s’embarquèrent pour la Guyane où ils ne songèrent tout d’abord qu’à se divertir. « J’ai vu, disait un témoin oculaire, ces déserts aussi fréquentés que le Palais-Royal. Des dames en robes traînantes, des messieurs en plumets marchaient d’un pas léger jusqu’à l’anse et Kourou offrit pendant un mois le coup d’œil le plus galant et le plus magnifique. On y avait amené jusqu’à des filles de joie. » (R) Mais ces brillants débuts ne furent pas de longue durée. « Les circonstances et le local avaient été mal choisis, les mesures furent plus mal prises encore… Sur ces plages désertes et impraticables pendant la saison des pluies, les subsistances, altérées par la chaleur, l’humidité et le transport, causèrent l’épidémie et la mortalité. Les inondations achevèrent de détruire ceux qu’avait épargnés la maladie. » (Vie privée de Louis XV.) (R)

Numéro
$1206


Année
1763




Références

Raunié, VII,352-54